Des habitudes d’intempérance

Dans cette conférence donnée en 1868, Henri Baudrillart étudie les causes de l’un des grands fléaux des classes ouvrières : l’intempérance, c’est-à-dire précisément l’alcoolisme. Il pèse une à une ces causes ou probables ou démontrées, et termine son discours sur la question des modes opératoires pour réformer, si ce n’est vaincre tout à fait, ce mal social dangereux.

Algérie. Rapport sur la situation économique de nos possessions dans le nord de l’Afrique

Devant l’Académie des sciences morales et politiques, dont les membres, quoique libéraux, sont aussi de fervents défenseurs de la colonisation, Adolphe Blanqui présente les conclusions d’un voyage qu’il vient d’effectuer en Algérie. L’un des principaux freins au développement de notre nouvelle colonie, dit-il, est l’état instable et embrouillé de la propriété, qu’il est urgent d’asseoir sur des bases solides. Il regrette aussi qu’on n’ait pas fait de l’Algérie une terre de libre-échange, et qu’au contraire la douane entrave un développement rendu difficile par ailleurs par bien d’autres considérations.

De la liberté de l’enseignement

« La vérité théorique, relativement à la liberté de l'enseignement, est fort simple. Elle consiste à dire que la faculté d'enseigner n'est point un droit dont le gouvernement ait besoin pour remplir sa véritable tâche ; qu'elle ne fait point partie essentielle et intégrante de sa souveraineté ; qu'elle n'est point, finalement, une magistrature ; qu'elle est une profession, une des grandes professions que l'économie de la société embrasse, profession en soi fort simple, fort naturelle, fort innocente, dont le gouvernement ne peut s'emparer au détriment de ceux qui la voudraient exercer honorablement et sans préjudice pour personne, et dans laquelle, naturellement, nul ne peut être responsable que de ses mauvaises actions. »

L’agriculture a besoin de liberté, non de distinctions

Si on doit rendre hommage aux Physiocrates d'avoir défendu, dans bien des questions, le laisser faire et le laisser passer, ils sont tombés dans l'erreur, selon Benjamin Constant, quand ils ont demandé des distinctions publiques pour l'agriculture. C'était, après avoir reconnu que l'autorité agissait mal, réclamer d'elle qu'elle agisse autrement : mais la seule action juste était qu'elle n'agisse pas, dit Constant.

Laissons Faire, n°46, juin 2022

Au programme de ce nouveau numéro : Essai de datation du Dictionnaire de l’Économie politique (1851-1853), par Benoît Malbranque. — Discours contre la colonisation de la France au Tonkin et à Madagascar, par Frédéric Passy (1885) — Les faits qui se sont produits depuis quarante ans justifient-ils les conclusions du pamphlet de Bastiat, Baccalauréat et socialisme ? (Société d’économie politique, réunion du 5 mai 1894.) — Recension critique : Œuvres complètes de Benjamin Constant. Série Documents. Volume I : Catalogue de la bibliothèque de Benjamin Constant, sous la direction de Kurt Kloocke, éditions De Gruyter, 2020.

Essai de datation du Dictionnaire de l’Économie politique (1851-1853)

Le Dictionnaire de l’Économie politique, conduit sous la direction de Charles Coquelin (mort en août 1852) et de Gilbert Guillaumin, a vu coopérer la plupart des grands noms du libéralisme économique français. Publié plus tard en deux forts volumes (respectivement en septembre 1852 et octobre 1853), il a toutefois d’abord vu le jour par livraisons successives, à partir d’août 1851. Une datation la plus précise possible des différentes couches d’articles peut avoir son utilité pour replacer ces productions pour certaines célèbres dans le contexte parfois agité qui les a vu naître. C’est ce qui est tenté ici, à partir des annonces retrouvées dans la presse périodique.

L’Institut de France et les anciennes Académies, par Léon Aucoc

Dans cette étude publiée en 1889, Léon Aucoc, membre de l’Institut, revient sur l’une des périodes agitées de l’histoire de cette institution, quand, au milieu du tourbillon révolutionnaire, elle est tour à tour supprimée puis rétablie. Était en débat, rappelle-t-il, l’utilité même d’une aristocratie officielle du savoir, au milieu d’institutions libres et démocratiques.

L’éducation doit-elle être libre ? (1828)

« Prodiguer les deniers des contribuables pour parvenir à imposer de force tel ou tel enseignement aux enfants que leurs familles pourraient et voudraient instruire, soit par elles-mêmes, soit par des maîtres délégués, c’est toujours, quelque pure intention qu’on ait, se permettre une exaction pour faire de la tyrannie. »

Notice biographique sur Anselme Batbie

Chrétien de cœur, Anselme Batbie a imprimé le sceau de ses convictions religieuses au libéralisme qu’il a défendu à l’Académie des sciences morales et politiques ou à l’Assemblée. Dans cette notice biographique, A. du Cassé revient sur cette particularité de sa personnalité et de sa trajectoire, au sein d’un libéralisme français resté tiraillé sur cette question de la religion.

Préface à “Pacifisme et colonisation” de François Nicol

En 1908, fortement affaibli et à moitié aveugle, Frédéric Passy s’est retiré dans les Pyrénées atlantiques pour prendre du repos. Il y reçoit (malgré ses ordres contraires), le texte d’une brochure qu’on lui lit, sur la manière de rendre compatibles la colonisation et l’idéal de la paix. Sceptique, quant à lui, sur le bienfondé de la colonisation, Passy ne peut manquer de rappeler ses convictions dans la courte préface en forme de lettre, que son « collègue », François Nicol, insère en ouverture de son texte.

Notice sur la vie et les travaux de M. Léon Aucoc 

À l’Académie des sciences morales et politiques, Maurice Sabatier retrace en mars 1913 la vie et les travaux de Léon Aucoc, membre défunt. Après une formation de juriste, Aucoc fut séduit un temps par le socialisme, avant que ses lectures ne le fassent passer décidément pour le libéralisme. De sa formation et de ses diverses fonctions au Conseil d’État, où il a longtemps travaillé, naquit un libéralisme consensuel et ouvert. Resté célèbre pour ses Conférences de droit administratif, il a aussi traité avec soin des recours pour excès de pouvoir pour protéger les simples citoyens des empiétements de la puissance publique.

Le socialisme d’État

En 1886, Léon Say rend compte devant ses collègues de l’Académie des sciences morales d’un nouveau livre de l’un des partisans les plus accrédités du socialisme d’État. S’engage alors une très longue discussion sur les attributions légitimes de l’État, au cours de laquelle de nombreux intervenants de marque, Paul Leroy-Beaulieu, Frédéric Passy, J.-G. Courcelle-Seneuil, E. Levasseur, précisent les termes de leur « nuance » libérale respective.

Allocution de Frédéric Passy sur les méfaits du tabac

En 1878, Frédéric Passy poursuit son combat contre ce qu’il présente comme deux fléaux de la moralité, de la santé et de l’économie française : l’alcool et le tabac. Appelé à fournir une courte allocution sur le tabac, en ouverture d’une conférence sur ce thème par le docteur Aimé Riant, il trace devant son auditoire tout ce que coûte, sur la santé, sur les rapports sociaux, sur les finances des individus et de l’État, ce dangereux passe-temps qui devient souvent addiction.

Lettres inédites de Léon Aucoc à Arthur Mangin

Sont publiées ici deux lettres et une carte de visite avec mention manuscrite, envoyées par Léon Aucoc, membre de l’Institut, juriste de formation rallié à la doctrine du libéralisme, et Arthur Mangin, collaborateur de Paul Leroy-Beaulieu au journal l’Économiste français. Dans l’une de ces lettres, Léon Aucoc précise la nature de son libéralisme et de ses convictions sur les attributions de l’État : tandis que Mangin reste fidèle à la conception de l’État minimal, Aucoc considère que le libéralisme doit s’ouvrir à plusieurs revendications légitimes d’intervention de l’État.

Discours contre la colonisation de la France au Tonkin et à Madagascar

En décembre 1885, lors de la grande discussion à l’Assemblée sur les questions coloniales, et notamment sur l’intervention au Tonkin et en Annam (Viet Nam), Frédéric Passy choisit à nouveau de prendre la parole pour une exposition longue et détaillée des raisons pour lesquelles, contrairement à la plupart de ses collègues de tous bords, il rejette la politique coloniale de la France. C’est une protestation vibrante et rare d’un authentique libéral, fidèle aux idéaux de ses prédécesseurs, contre la politique de spoliation à l’extérieur qui s’appelle colonisation.

État de la question d’Afrique

En 1843, Gustave de Beaumont répond à une brochure du général Bugeaud et remet en cause la politique purement militaire que celui-ci mène et entend poursuivre en Algérie. Pour Gustave de Beaumont, la colonisation de l’Algérie est une œuvre de la plus haute importance pour la France et il la soutient pleinement. Mais après la phase de la conquête, il faut désormais que la colonisation agricole et de peuplement s’accentue, et cela ne peut se faire qu’à deux conditions : 1° qu’on donne à l’Algérie des institutions qui protègent la propriété et établissent un minimum de droits et libertés ; 2° qu’à la colonisation sous l’impulsion de l’État et par les fonds de l’État, on substitue une colonisation libre et issue de l’initiative privée.

Entre mère et fille

Sans cesse sur la brèche, Frédéric Passy a consacré son infatigable ardeur à la popularisation des nombreuses idées qui lui tenaient à cœur. Dans cette petite brochure d’éducation féminine, publiée en 1907, il présente en language accessible à l’enfance les mystères de la reproduction et offre des conseils aux jeunes gens, sur le mariage, la vie sentimentale, et les principes de la vie quotidienne. 

Anarchisme théorique et collectivisme pratique, par Alphonse Courtois (1885)

Pour lutter contre le développement des idées socialistes, qu’il présente comme l’exact opposé des vérités démontrées de l’économie politique, Alphonse Courtois étudie dans cette brochure leurs fondements et leurs modes de réalisation. L’étude des principaux auteurs de ce courant — Karl Marx, F. Engels, Schäffle — montre que derrière un anarchisme théorique (l’État disparaissant en théorie avec la fin de la société de classes), se trouve un collectivisme pratique, dont les moyens tyranniques laissent prévoir une immense déchéance à la nation qui aurait l’imprudence d’appliquer le socialisme à la mode de ces auteurs.

Des limites de l’intervention de l’État dans la question ouvrière

Lors de la discussion à l’Académie des sciences morales et politiques en 1886, sur les attributions légitimes de l’État, Léon Aucoc prend la parole après les partisans du laissez-faire, Paul Leroy-Beaulieu et J.-G. Courcelle-Seneuil, et après les réclamations faites par le philosophe Paul Janet, plus ouvert aux revendications du socialisme. Pour Léon Aucoc, s’opposer au socialisme est une évidence, et lui-même se place dans le camp du libéralisme, mais d’un libéralisme souple, prêt à quelques concessions. Car pour remporter la bataille des idées, soutient-il, il convient de ne pas s’accrocher à des principes théoriques absolus et relevant de l’utopie, au risque de rester sans poids dans les discussions politiques.

Correspondance entre M. Graslin et M. l’abbé Baudeau sur un des principes fondamentaux de la doctrine des soi-disants philosophes économistes

En 1777, l’économiste Graslin publie en brochure la discussion critique échangée dix ans auparavant entre lui-même et le physiocrate Baudeau. Il s’agissait alors du premier livre de controverse économique de l’histoire. Dans cette discussion (arrangée éditorialement par Graslin, qui prit quelques libertés) les deux économistes débattaient tout d’abord de la question de la productivité de l’industrie ; la discussion passait ensuite sur le thème du progrès technique et du sort des ouvriers remplacés par les inventions nouvelles.