Intervention du 13 juin 1849 sur le projet de loi relatif à l’état de siège

Intervention du 13 juin 1849 sur le projet de loi relatif à l’état de siège

[Moniteur, 14 juin 1849.]

 

REPRISE DE LA SÉANCE. 

RAPPORT ET DISCUSSION SUR LE PROJET DE LOI RELATIF À L’ÉTAT DE SIÈGE.

(M. le président remonte au fauteuil à cinq heures et demie.) 

LE CITOYEN LABABIT. Je demande la parole pour une rectification. (Non ! non !) Je suis porté comme ayant voté sur les conclusions de la commission…. 

De toutes parts. Le rapport avant tout ! 

(Le citoyen Gustave de Beaumont, rapporteur, monte à la tribune.) 

LE CITOYEN PRÉSIDENT. J’invite l’Assemblée à garder le plus profond silence, non seulement pour la dignité du vote, mais même pour abréger ses délibérations dans une matière où elle est consultée sur l’urgence. Les interruptions allongent d’une manière déplorable les discussions. 

La parole est à M. Gustave de Beaumont, au nom de la commission. (Profond silence.) 

LE CITOYEN GUSTAVE DE BEAUMONT, rapporteur. La commission à laquelle vous avez renvoyé d’urgence l’examen du décret porté tout à l’heure à votre tribune par M. le président du conseil, m’a chargé de vous rendre compte de sa délibération.

Dans les circonstances solennelles où nous sommes, Messieurs, ses résolutions ne pouvaient être douteuses. Votre commission a été à l’unanimité d’avis de vous proposer de déclarer l’urgence sur le décret. À la même unanimité, elle vous propose d’adopter le décret lui-même. 

Messieurs, il est des moments où toutes les nuances de partis et où toute dissidence d’opinion s’effacent. Nous sommes arrivés à ce moment suprême où la société, menacée par les partis anarchiques, ne peut être sauvée que par l’union intime de tous les amis de l’ordre ralliés étroitement sous le drapeau de la République et de la constitution. (Très bien ! très bien ! — Vive approbation.) 

Vous n’attendez point de nous des discours, alors que les faits se passent sous vos yeux ; vous le savez, après le signal tombé en quelque sorte du haut de la tribune et répété par les organes de la presse démagogique, la sédition a éclaté dans la cité. Ce n’était pas assez du fléau qui en ce moment décime la population parisienne, il fallait y ajouter encore celui de la guerre civile. Déjà des rassemblements contraires à la loi, auxquels se mêlaient des cris inconstitutionnels, se sont montrés sur plusieurs points ; ces rassemblements, dispersés par la force, se sont séparés en criant aux armes ! des boutiques d’armuriers ont été pillées, des barricades ont été élevées sur plusieurs points ; elles ont été enlevées par la garde nationale et l’armée : d’autres s’élèvent en ce moment. Des coups de feu ont été tirés, déjà le sang a coulé. Ces faits, Messieurs, nous ont été tout à l’heure exposés par M. le président du conseil et par M. le ministre de l’intérieur : je ne fais que les reproduire. Dans ces circonstances, la population parisienne, l’armée, la garde civique, ont montré une aversion profonde pour les desseins des factieux et leur ferme volonté de les combattre. Mais les bons citoyens ont besoin d’être rassurés et soutenus : le gouvernement a besoin de tous les moyens d’action qu’il nous demande pour vaincre l’anarchie et rétablir la sécurité publique. Plus la répression sera prompte et énergique, plus elle sera efficace ; il est des cas où l’énergie est encore de l’humanité. (C’est vrai ! — Très bien !) 

En conséquence, la commission dont je suis l’organe a l’honneur de vous proposer, sans plus de développements, d’abord la déclaration d’urgence, puis l’adoption du projet de décret présenté par le président du conseil, et dont la teneur suit : 

« Art. 1er. La ville de Paris et toute la circonscription comprise dans la 1re division militaire sont mises en état de siège. 

Art. 2. Cette mesure pourra être étendue par le pouvoir exécutif aux villes dans lesquelles semblables insurrections éclateraient. »

A propos de l'auteur

Gustave de Beaumont est resté célèbre par sa proximité avec Alexis de Tocqueville, avec qui il voyagea aux États-Unis. Son œuvre, sur l'Irlande, les Noirs-Américains, ainsi que ses nombreux travaux académiques et politiques, le placent comme un auteur libéral sincère et généreux.

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