L’immigration et l’éventualité de la dénationalisation de la France

Au début du XXsiècle, la France, dont la natalité est en baisse, a recours à l’immigration pour soutenir sa population. En sociologue et en économiste, Paul Leroy-Beaulieu étudie ce mouvement et ses conséquences dans son ouvrage sur La question de la population (1913). Selon lui, l’agglomération d’individus étrangers ou naturalisés, dans des villes particulières où ils conservent leur culture et leur langue, fait courir au pays un risque de « dénationalisation » qui se matérialisera rapidement, en quatre ou cinq générations.

L’immigration et l’éventualité de la dénationalisation de la France

par Paul Leroy-Beaulieu

Si peu dense que soit actuellement la population de la France, on espère qu’elle se maintiendra, si même elle n’augmente légèrement, malgré l’insuffisance des naissances, grâce à l’immigration. « Eh bien, ces étrangers qui afflueront, attirés par de bons salaires et par l’attrait du climat, on les naturalisera, on les assimilera, on en fera des Français. La France, dit-on, est douée d’une rare puissance d’assimilation. Voyez les Francs, les Normands, les Wisigoths et autres envahisseurs, la population gallo-romaine ou plutôt gauloise, superficiellement romanisée, des anciens temps les a assimilés ; il n’y a pas de raison pour que la population française contemporaine et à venir ne fasse pas de même en ce siècle et dans les siècles suivants. »

Eh ! si, il y a des raisons pour que cette œuvre d’assimilation des éléments étrangers soit plus difficile, sinon impossible, partielle seulement et non intégrale ; un examen attentif le montrera.

On se flatte d’éviter la dépopulation de la France par l’assimilation graduelle des immigrants étrangers, la France devenant un pays d’immigration constante comme les contrées d’Amérique. Il est à craindre qu’on n’éprouve là une cruelle déception et que l’on ne puisse prévenir la dépopulation qu’en subissant la dénationalisation de la France : Dépopulation prochaine ou Dénationalisation prochaine de la France, s’il ne se produit un revirement prompt et décisif de la mentalité française, voilà le dilemme ; voilàla destinée qu’on peut regarder comme inéluctable; le chapitre suivant en fournira la démonstration[1].

 

CHAPITRE III

 LA QUESTION DES ÉTRANGERS RÉSIDANT. 

L’ÉVENTUALITÉ DE LA DÉNATIONALISATION DE LA FRANCE.

Espérances que l’on fonde sur les facultés assimilatrices de la France pour franciser les immigrants étrangers. — Les grandes nations futures seraient des conglomérats d’éléments hétérogènes. — Illusions graves qui se rattachent à cette conception. — La loi de 1889 sur la naturalisation ; quoique bonne, elle ne peut avoir que des résultats bornés. — Les étrangers immigrant en France ne sont plus et surtout ne seront pas, à l’avenir, dans des conditions facilitant l’assimilation. — L’immigration temporaire et l’immigration permanente. — Nombre des étrangers résidant et des naturalisés d’après les recensements successifs depuis 1851. — Les immigrants se concentrent par grandes masses et par nationalités déterminées dans les départements proches de la frontière et dans les grandes villes. — Ils constituent des corps étrangers homogènes, gardant leur langue nationale propre et sont malaisément perméables à la mentalité française. — Avec le développement futur fatal de ces corps étrangers homogènes et imperméables à la mentalité française, on doit arriver, sauf relèvement prompt de la natalitéfrançaise ou cessation de son déclin, à la dénationalisation progressive, sinon de la France entière, du moins de certaines parties de la France.

La France, quoique son sol, sinon son sous-sol, soit un des meilleurs du monde et que sa richesse accumulée se trouve énorme, n’a que 72 habitants au kilomètre carré tandis qu’elle est environnée de nations qui, sauf l’Espagne, ont une densité de population beaucoup plus considérable : encore a-t-on vu que, avec les tendances actuelles de la population française, cette faible densité de la France est appelée, sauf immigration, à diminuer rapidement.

Nous avons dit, au chapitre précédent, que nombre de personnes comptent sur cette immigration pour prévenir, d’une part, la dépopulation du pays et, grâce à la faculté d’absorption qui distingue notre race et que démontrent de nombreux précédents historiques, pour fortifier, par des éléments étrangers graduellement assimilés, la nationalité française.

M. Novicow, notamment, le sociologue russe si sympathique à la France, auteur plein de verve, d’ingéniosité et d’optimisme, dans son ouvrage : L’Avenir de la Race Blanche critique du Socialisme contemporain, cherche à dissiper les appréhensions que peut susciter le réveil de l’Asie et qu’excite même, chez certains, l’évolution éventuelle de la race noire. La France, notamment, suivant lui et d’autres, pourrait par la naturalisation, forme nationale de l’adoption, avec cette particularité qu’elle comporte parfois la contrainte, se procurer, par milliers, les enfants que la race ne lui fournit pas, mais que son sol, peu encombré et séduisant, attire des nations voisines. On insiste sur l’expérience qui prouve que la race française possède d’exceptionnelles facultés assimilatrices.Quant à croire que la race française en serait fâcheusement modifiée, c’est, ajoute-t-on, une profonde erreur. M. Novicow démontre qu’il n’existe pas de races caractérisées dans l’Occident du Continent européen ; il ne s’y rencontre que des sortes de conglomérats historiques. La France, en particulier, contient des « dolichocéphales blonds » et des « brachycéphales bruns », les premiers réputés nobles et les seconds réputés vils, des exemplaires de l’homo europœus, que l’on tient pour supérieur et de l’homo alpinusque l’on tient pour inférieur. Les deux variétés tantôt se sont fondues, tantôt coexistent plus ou moins juxtaposées et l’ensemble donne satisfaction, n’ayant rien de discordant et de désagrégeant. On en conclut qu’un système suivi et méthodique de naturalisation pourra parer, dans une certaine mesure, à l’affaiblissement de notre natalité, en supposant que celle-ci ne se relève pas, ce qui ne saurait venir que de l’action énergique et prompte de causes morales modifiant profondément en France la notion de la famille.

On pourrait étendre davantage ces observations et pousser plus loin cette doctrine. Il serait facile de soutenir que les nations actuellement en formation et en développement sont et seront de plus en plus des conglomératsde races diverses: les États-Unis avec leur base anglo-saxonne, mêlée d’un puissant élément germanique et qui reçoivent maintenant des alliages nombreux d’éléments scandinaves, italiens, slaves, sans parler de 10 millions de nègres et d’hommes de couleur ; l’Amérique latine avec sa double base espagnole ou portugaise, d’une part, indienne de l’autre, avec l’afflux d’éléments italiens, français, germaniques, yankees, ces deux derniers appelés sans doute à prendre beaucoup de développement avec le temps.

En recevant des milliers, des dizaines de mille, même des centaines de mille, et ultérieurement des millions d’immigrants des nations prolifiques voisines ou peu distantes, la France ne constituerait donc pas une exception dans l’univers ; elle se rapprocherait de l’état interne des peuples du Nouveau-Monde.

L’avenir qu’on nous présente ainsi nous apparaît comme peu séduisant. Il ne manquerait plus que de joindre à tous les apports précédents, pour s’englober dans la nation française et pour y combler les vides causés par la faiblesse de plus en plus accentuée de la natalité, des Africains, Arabes ou Noirs et des Asiatiques. Une nation composée d’éléments aussi hétérogènes risquerait d’être fort inférieure en harmonie, en coopération volontaire et dévouée, en discipline acceptée, en communauté ou rapprochement de mœurs et d’idées, aux vieilles nations européennes où les éléments divers, en les supposant hétérogènes, ont été fondus par l’action lente des siècles, comme l’Allemagne, l’Angleterre et même l’Italie.

Laissons là l’avenir des conglomératsd’hommes de race diverse, comme ceux qui se constituent dans les deux Amériques et occupons-nous simplement de la France future en la comparant à la France du passé et du présent.

Nous avons été de ceux qui, jadis, ont provoqué le vote de la loi de 1889 sur la naturalisation, laquelle empêche que des générations d’étrangers se perpétuent indéfiniment sur notre sol, en échappant aux charges de la population française, notamment au service militaire[2]. Cette loi de 1889 est une bonne loi, mais elle ne peut être complètement efficace.

On ne prend pas garde que l’immigration étrangère en France n’est plus exactement de même nature qu’autrefois et qu’un grand nombre, sinon la plupart, des étrangers immigrés, se trouvent en France, dans des conditions tout à fait autres que les étrangers de jadis.

Il faut d’abord distinguer l’immigration permanente et l’immigration temporaire. La première se compose d’hommes qui viennent dans le pays pour s’y fixer, pour y prendre racine ou qui, s’ils n’ont pas cette idée et ces dispositions au début, les prennent au bout d’un certain temps.

L’immigration permanente qui fonde des familles dans le pays peut parfois servir au recrutement de la population française. Néanmoins, même ces immigrants permanents ne sont plus aussi facilement assimilables qu’ils l’étaient jadis. Ils appartiennent souvent aujourd’hui à des nationalités voisines fortement constituées, comme l’Italie, l’Allemagne ; ils restent groupés dans les régions frontières ou dans les grandes villes, ayant entre eux des relations étroites, gardant leur langue, ayant des journaux en cette langue, se tenant en rapport avec les consuls de leur nation. Que l’on suppose qu’à la longue il se fasse une infiltration de plusieurs centaines de mille Allemands, même un jour de plusieurs millions en Lorraine, en Champagne, en Franche-Comté, en Bourgogne, qui pourrait prétendre que cela ne constituerait pas un grand danger et que la population française assimilerait aisément ces immigrants ? Ce phénomène d’infiltration se présente déjà, avec de moindres dangers, en Provence, de la part des Italiens et un peu en Languedoc et en Roussillon, de la part des Espagnols.

Heureusement, les Allemands n’immigrent jusqu’ici chez nous que dans les grandes villes, notamment à Paris, mais il n’est pas certain qu’il en soit toujours ainsi ; l’Allemagne ne pourra conserver éternellement sur son territoire le million environ de nouveaux Allemands que l’excédent des naissances sur les décès y produit chaque année. Même en admettant que cet excédent des naissances sur les décès diminue graduellement, l’Allemagne devra à une date plus ou moins prochaine, mais non très distante, fournir de nouveau à l’immigration transatlantique les masses qu’elle lui fournissait autrefois et qui se sont élevées à 200 000 âmes en certaines années ou même au delà (voir plus loin, p.489). Rien ne dit que outre cette émigration transatlantique, elle ne fournisse pas un jour une émigration destinée à l’Europe, avec ou sans esprit de retour, allant se fixer dans les contrées limitrophes favorables et attrayantes, parmi lesquelles, avec sa faible densité de population et sa richesse moyenne, peut se trouver la France.

À l’heure présente, l’immigration permanente en France tend à devenir moins importante que l’immigration temporaire. Notre région manufacturière et minière de l’Est se trouve envahie, non pas par des Allemands, mais par des Italiens et aussi par des Polonais ; ce sont également des Polonais qui se rendent par groupes dans le Nord de la France et jusque dans l’Ile-de-France.

Cette immigration temporaire s’effectue par bandes ; ce sont des adultes, sans famille, qui viennent faire une saison ou passer deux ou trois années dans le pays et puis s’en vont ; il en est de même en Languedoc pour les Espagnols. Traversant, au printemps de 1912, un bourg minier de cette région, je voyais une baraque sur laquelle était écrit en grosses lettres : Cambusa español (cambuse espagnole). Cette immigration temporaire de plus en plus nombreuse ne fait pas souche dans le pays : elle n’est pas assimilable. La France est exposée à avoir des centaines de mille hommes, sinon un jour des millions d’hommes, qui sont ainsi simplement campés sur son territoire, sans aucune idée d’y jeter des racines. Cette immigration temporaire est, toutefois, politiquement et nationalement moins dangereuse que l’immigration permanente d’éléments appartenant à de fortes nationalités voisines.

Cette dernière immigration, économiquement utile, nationalement inquiétante, a chance de grandement se développer si la faiblesse de notre natalité s’accentue.

Les immigrants temporaires ne prennent rien de la mentalité française et des usages français. Souvent même, ils ne se donnent pas la peine d’en apprendre, nous ne dirons pas la langue, mais les mots les plus usuels de cette langue. Ils sont fréquemment embrigadés, conduits par un chef, qui les dirige, répond d’eux, traite pour eux, est seul en relations directes avec les personnes qui les occupent, et d’une façon générale, avec les gens du pays.

Il en est même ainsi parfois — et il est à craindre que cela ne devienne bientôt général — de l’immigration permanente, celle qui se fixe dans le pays sans esprit de retour. Elle ne se disperse pas, en effet, sur la surface entière de la France ; elle reste coagulée dans certains districts, pas toujours dans les districts frontière ou du moins de la frontière de son pays d’origine. Ainsi, il y a des milliers ou des dizaines de milliers d’Italiens dans les districts miniers de la Lorraine.

Il est intéressant de jeter un coup d’œil sur la population étrangère en France. Chose curieuse, elle ne paraît guère s’être accrue depuis un quart de siècle, et à un moment même, elle semble avoir diminué ; c’est que le nombre des naturalisés a sensiblement augmenté, ce qui est la cause du peu d’accroissement du nombre des étrangers ayant gardé leur nationalité ; on saisit ici l’effet de la loi de 1889, relatée plus haut. Si l’on se reporte soixante ans en arrière, on voit, toutefois, combien se sont développés le nombre et la proportion des naturalisés et des étrangers en France.

Nous croyons devoir reproduire à ce sujet un très intéressant tableau publié dans les documents relatifs au recensement de 1906, le dernier sur lequel l’on ait au moment où nous écrivons (septembre 1912) des renseignements détaillés ; nous le complétons par les indications actuellement connues relatives au recensement de 1911; le recensement de 1851 est le premier où l’on ait distingué les habitants suivant la nationalité :

ANNÉES NÉS FRANÇAIS NATURALISÉS ÉTRANGERS
Au total Par 10 000 habitants Au total Par 10 000 habitants
1851 35 388 814 13 525 4 79 289 106
1861 36 864 673 15 259 4 506 381 135
1866 37 415 283 16 286 4 655 036 172
1872 35 346 695 15 303 4 740 668 203
1876 36 069 524 34 510 9 801 754 217
1881 36 327 154 77 046 21 1 001 090 267
1886 36 700 342 103 886 28 1 126 531 297
1891 36 832 470 170 704 45 1 130 211 297
1896 37 014 389 202 715 53 1 051 907 275
1901 37 195 133 221 784 59 1 033 871 269
1906 37 575 586 222 162 57 1 046 905 270
1911 » » » 1 132 696 286

Ce tableau mérite quelques commentaires : en 1851 il n’y avait en France que 379 289 étrangers et 13 525 naturalisés, ensemble 392 814 habitants pouvant être considérés comme un élément hétérogène ; c’était une proportion quasi négligeable de 11 p. 1000 habitants, guère plus de 1 p. 100. En 1872, au lendemain de la chute du Second Empire, lequel avait été une époque de grande prospérité économique et de natalité relativement bonne en France, le nombre des étrangers et des naturalisés avait presque doublé, les premiers s’élevant à740 668 et les seconds à 15 303, ensemble 755 971, ou 20,7 p. 1000 habitants, un peu plus de 2 p. 100. En 1886, le nombre des étrangers monte à 1 126 531 et celui des naturalisés à 103 886, ensemble 1 230 417, ou 32,5 p. 1000 habitants ; la proportion des éléments hétérogènes a augmenté de plus de 50% sur le sol français dans les quatorze années de 1872 à 1886. Depuis lors, le nombre des étrangers a paru ne guère s’accroître et même reculer un instant ; l’effet de la loi de 1889 se faisait sentir par l’accroissement sensible du nombre des naturalisés, avec un léger fléchissement ou la stagnation du nombre des étrangers proprement dits. En 1906, on comptait 1 046 905 de ceux-ci et 222 162 de ceux-là, ensemble 1 269 067, ou 32,7 p. 1000 habitants.

Le recensement de 1911 constate une augmentation assez sensible des étrangers, dont l’effectif atteint 1 132 696, soit 85 791 de plus qu’en 1906 ; nous ignorons encore (septembre 1912) le nombre des naturalisés d’après le recensement de 1911, mais il a dû s’accroître légèrement ; la proportion des seuls étrangers à la population totale étant de 286 pour 1000, en supposant que la proportion des naturalisés fût restée la même que lors du recensement de 1906, on aurait, pour ces deux éléments hétérogènes réunis, une proportion de 34,3 p. 1000 habitants, soit de près de 3,5 p. 100, plus que triple de celle de 1851 et de 70% plus élevée que celle de 1872.

Notons que ce tableau présente ces éléments hétérogènes sous un jour atténué ; il ne s’agit, en effet, parmi les naturalisés, que de ceux qui sont nés à l’étranger ; mais il est bon de tenir compte que la première génération d’enfants de naturalisés français, alors même qu’elle serait née sur le sol français, peut être considérée comme ayant une origine étrangère qui n’a pas eu encore toujours le temps de se perdre ; les enfants nés en France de parents naturalisés ont été élevés dans une famille qui, en beaucoup de cas, conserve, en partie du moins , une mentalité étrangère . Cela est vrai surtout quand il s’agit de naturalisés qui se trouvent au milieu d’une agglomération importante de leurs compatriotes concentrée sur un point spécial du sol français. La mentalité étrangère, la conscience étrangère, ne disparaît pas, dans ce cas, rapidement. Si l’on tenait compte de cette observation et que l’on classât parmi les naturalisés tous les enfants nés à l’étranger ou en France de ceux qui ont reçu personnellement la naturalisation, le nombre des naturalisés devrait être relevé tout au moins de moitié et se rapprocherait de 330 000. Joints aux 1 132 696 étrangers constatés par le recensement de 1911, cela ferait un ensemble d’éléments hétérogènes d’environ 1 500 000 âmes, soit de près de 4% de la population totale de la France.

Quelques personnes trouveront encore qu’environ 1 300 000 âmes d’éléments hétérogènes, cela ne doit pas susciter de vives alarmes. Mais, outre que ce nombre paraît appelé, avec notre natalité de plus en plus décroissante, à augmenter rapidement, à doubler, à tripler même sans doute dans un laps de quelques dizaines d’années, il faut tenir compte de ce que ces éléments hétérogènes sont très inégalement répartis sur le sol et parmi la population française ; ils se concentrent sur des points spéciaux ; ils mordent graduellement sur les frontières de la France et l’entament peu à peu.

Avec les documents relatifs au recensement de 1906, le seul dont les résultats détaillés soient connus à l’heure actuelle, nous dressons le tableau suivant relatif aux étrangers et aux naturalisés, dans les départements où ils sont le plus nombreux. On remarquera que la situation a dû s’aggraver de 1906 à 1911, puisque, à cette dernière date, on comptait 85 791 étrangers de plus qu’en 1906 :

NOMBRE D’ÉTRANGERS ET DE NATURALISES EN 1906 DANS LES DIX DEPARTEMENTS FRANÇAIS QUI EN ONT LA PLUS FORTE PROPORTION RELATIVEMENT À LEUR POPULATION TOTALE[4]

DÉPARTEMENTS POPULATION totale en 1906 NOMBRE d’étrangers NOMBRE des naturalisés RAPPORT des étrangers à la population totale du département pour 10 000 âmes RAPPORT des naturalisés à la population totale du département pour 10 000 âmes
Alpes-Maritimes 366 568 102 872 6 858 2 807 187
Bouches-du-Rhône 769 533 124 426 12 780 1 617 166
Var 322 933 42 426 4 818 1 321 149
Nord 1 882 219 183 153 36 363 973 193
Territoire de Belfort 95 000 8 438 3 699 888 389
Meurthe-et-Moselle 513 984 44 608 17 501 868 340
Ardennes 315 410 19 758 5 857 626 186
Seine          Paris 2 719 924 170 000 42 673 625 157
                 Banlieue 1 068 642 36 949 14 533 346 136
Pyrénées-Orientales 211 788 11 103 1 103 524 52
Basses-Alpes 110 307 4 610 361 418 32

Ainsi, sur 366.568 habitants en 1906, le département des Alpes-Maritimes comptait 102 872 étrangers et 6 858 naturalisés, soit ensemble 30% de sa population. On peut dire que ce département est dans des conditions spéciales, ayant été acquis, pour la plus grande partie, de l’Italie qui le céda en 1860 et ayant toujours eu un fond de population italien, ce qui explique que l’attraction pour l’immigration italienne y soit grande. Mais voici deux départements bien anciennement français, les Bouches-du-Rhône et le Var, qui ont une très forte proportion de population étrangère. Dans les Bouches-du-Rhône, en 1906, sur 769 533 habitants, on comptait 124 426 étrangers et 12 780 naturalisés, ensemble plus de 136 000, soit, pour ces deux éléments réunis, 18%, en nombre rond, du chiffre de la population totale. Quant au Var, sur 322 933 habitants, il comptait 42 640 étrangers et 4 818 naturalisés, ensemble 47 458, soit environ 15% du total de sa population. Dans le vaste département du Nord, sur 1 882 219 âmes, il y avait 183 153 étrangers et 36 363 naturalisés, ensemble 219 516 âmes hétérogènes ou près de 12% du total de la population. La proportion est à peu près égale pour plusieurs départements de l’Est : le territoire de Belfort, Meurthe-et-Moselle, les Ardennes où, pour tous les trois, les étrangers et les naturalisés réunis constituent entre un peu plus de 10 et un peu plus de 12,5% du total des habitants.

À Paris, le nombre des étrangers était, en 1906, de 170 000 et celui des naturalisés de 42 673, soit 782 p. 10 000 habitants ; il est moindre dans la banlieue de Paris, faisant partie du département de la Seine, soit 36 949 étrangers et 14 533 naturalisés, ou 482 habitants d’origine hétérogène pour 10 000 âmes de population. Pour l’ensemble du département de la Seine, le total des étrangers et des naturalisés atteignait presque 265 000 âmes, à savoir 206 949 des premiers et 57 206 des seconds.

D’autre part, sur la frontière méridionale, limitrophe de l’Espagne, les Pyrénées-Orientales, sur 211 788 âmes de population totale, comptent 11 103 étrangers et 1 103 naturalisés, ensemble 12 206 ou près de 6% du total des habitants.

Toute la périphérie de la France et le cœur même, en ce qui concerne la capitale et sa banlieue, sont ainsi envahis par les étrangers, dont la proportion, par rapport à la population totale, dans une dizaine de départements, parmi lesquels trois sont des plus importants, variait, naturalisés compris, entre 4,5% et près de 30% en 1906. Ces proportions doivent être aujourd’hui assez sensiblement dépassées, puisque le recensement de 1911 a fait ressortir une augmentation, depuis 1906, de 85 791 étrangers, soit de 8,19%, tandis que le total des habitants de la France ne s’est accru dans le même intervalle que de 349 242 ou seulement de 0,89% ; le nombre des étrangers, dans l’intervalle des deux recensements de 1906 et de 1911 s’est donc accru dix fois plus relativement que le nombre total des habitants de la France.

Peu importe que les départements de la Creuse, du Morbihan, de la Vendée, du Finistère, du Cantal, de la Lozère, de la Mayenne, de la Corrèze et quelques autres n’aient qu’un nombre tout à fait insignifiant d’étrangers et de naturalisés, quelques dizaines ou quelques centaines, de 4 à 8 p. 10 000 habitants : ou plutôt il vaudrait beaucoup mieux qu’ils en continssent dix fois plus et que les étrangers et naturalisés ne constituassent pas de grosses agglomérations sur la périphérie du territoire et dans quelques grandes villes.

Cette concentration des étrangers en certains districts est encore plus forte que les chiffres cités plus haut n’en donnent l’idée ; ces chiffres concernent l’étendue entière des départements indiqués : mais, à l’intérieur de ces départements, la concentration des étrangers est souvent plus forte dans un arrondissement que dans les autres, de sorte que les étrangers peuvent arriver à constituer la majorité des habitants d’un arrondissement : ainsi, les 44 608 étrangers de Meurthe-et-Moselle se trouvent, en très grande partie, dans le seul arrondissement de Briey. Les 124 426 étrangers du département des Bouches-du-Rhône sont, pour plus des quatre cinquièmes, dans la ville de Marseille ; ils y peuplent presque exclusivement des quartiers spéciaux où retentit presque uniquement l’idiome italien.

Ce qui ajoute encore au nationalisme persistant de ces étrangers, c’est que, dans chaque région, ils appartiennent presque tous à la même nationalité. Voici la répartition des étrangers par nationalité :

EFFECTIFS DES ÉTRANGERS EN FRANCE

1886 1901 1906 1911
Allemands 100 114 89 772 87 830 »
Américains 10 253 16 172 16 956 »
Anglais (Royaume-Uni) 36 134 36 948 35 990 »
Austro-Hongrois 11 817 11 730 13 021 »
Belges 482 261 323 390 310 433 »
Luxembourgeois 37 149 21 999 »
Espagnols 79 550 80 425 80 914 »
Italiens 264 568 330 465 377 638 »
Russes 11 980 16 061 25 605 »
Suisses 78 584 72 042 68 892 »
Autres nationalités 10 738 23 669 27 050 »
Nationalité inconnue 3 363 11 198 2 570 »
Total 1 126 531 1 033 871 1 046 905 1 132 696

Les Allemands jusqu’ici sont en nombre limité ; une partie des étrangers qui sont classés sous cette rubrique peuvent être Alsaciens, le cinquième ou, tout au plus, le quart peut-être. Jusqu’ici les Allemands, de la classe ouvrière ou paysanne, largement occupés par l’essor de leur propre pays, ne sont guère attirés en France, surtout dans les campagnes et les petites villes où on leur ferait un accueil peu empressé. Ceux qui viennent en France soit pour y faire fortune, soit pour s’y fixer, sont, en général, des Allemands de la classe moyenne, plutôt petite moyenne, artisans, commis, négociants. Beaucoup y réussissent ; on trouve, par exemple, à Reims, à Bordeaux et dans les villes viticoles du Midi de très importantes maisons de vins qui sont d’origine allemande. Les juifs allemands tendent aussi à affluer chez nous. À Paris, on comptait 25 831 Allemands en 1906 et dans les autres communes du département de la Seine 5 470.

Nos départements frontières de l’Est Centre, néanmoins, ont une assez forte proportion d’Allemands : 17 782 pour la Meurthe-et-Moselle, 5 850 pour les Vosges, 5 094 pour le territoire de Belfort, 1 713 pour la Meuse, 1 439 pour le Doubs, 2 068 pour la Marne, 1 145 pour la Haute-Saône. Ce ne sont pas là des chiffres négligeables, notamment les trois premiers. Même en admettant que les Alsaciens-Lorrains forment un tiers de cet effectif, les deux autres tiers restant pour les véritables Allemands résidant dans ces départements frontières ne laisseraient pas d’être préoccupants, d’autant qu’ils ne sont pas disséminés sur tout le territoire de ces départements, qu’ils s’y concentrent dans les villes ou dans les cantons proches de la frontière.

Les Belges et les Luxembourgeois au nombre de 310 433 en 1906 ne donnent lieu à aucune appréhension particulière, leur nationalité n’étant pas redoutable et étant sympathique[4]. Les Suissesau nombre de 68 892 sont exactement dans le même cas. Quoique la situation soit différente, en ce sens qu’il s’agit ici de très fortes nationalités, il n’y a pas lieu à alarme, non plus, du côté des 35 990 Anglais, des 23 605 Russes (la plupart, sans doute, Polonais, ouvriers agricoles ou mineurs), des 16 936 Américains et même des 13 021 Austro-Hongrois, dont la moitié tout au plus, vraisemblablement, est d’origine germanique, ces peuples divers n’étant pas en antagonisme avec la France : et ayant peu de chances de le devenir. Les 27 030 étrangers résidant de nationalités diverses et les 2 370 de nationalité inconnue, étant à répartir entre de nombreuses nations, ne peuvent non plus être une cause de préoccupation grave.

Les Italiens et les Espagnols, sinon nos frères, du moins nos cousins-germains, liés à nous par bien des traits du caractère, de la mentalité et par le développement historique, seraient, à coup sûr, les bienvenus s’ils se disséminaient davantage sur le territoire français, au lieu de s’y concentrer dans quelques départements en agglomérations compactes. Ces agglomérations par leur importance forment des colonies exclusives qui deviennent difficilement perméables à la langue française et aux conceptions purement françaises. On ne comptait encore que 80 914 Espagnols en 1906 ; mais le nombre tend à considérablement s’en accroître. Ils envahissent le Roussillon et le Bas Languedoc, ainsi que le Béarn.

En 1906, on comptait 10 404 Espagnols, dans les Pyrénées-Orientales, soit en nombre rond 5% de la population, 13 377 dans les Basses-Pyrénées ou 3,25%, 2 350 dans les Hautes-Pyrénées, 8 182 Espagnols dans l’Hérault, 8 484 dans l’Aude, 5 686 dans la Gironde, 4 599 dans la Haute-Garonne, 4 566 dans le Gers. Ces nombres ont dû notablement s’accroître dans l’intervalle entre les recensements de 1906 et de 1911 et ils sont appelés à augmenter encore notablement. On peut être certain que, d’ici à peu d’années, on comptera plusieurs centaines de mille Espagnols concentrés dans les sept ou huit départements voisins des Pyrénées.

Le mouvement d’infiltration des Italiens en France est bien plus prononcé encore et il continuera également de s’accentuer. On comptait 264 568 Italiens en France en 1886, 330 465 en 1901 et 377 638 en 1906 ; en 1911, ils doivent avoir franchi le chiffre de 400 000, ce qui représente presque la population d’un de nos départements moyens, sans compter que, si l’on y joignait les naturalisés d’origine italienne, cet effectif devrait être grossi, sans doute, de 12 ou 15%. Le recensement de 1906 comptait 78 283 Italiens dans le département des Alpes-Maritimes, soit plus de 20% de la population de ce département ; 111 801 Italiens dans les Bouches-du-Rhône, la plupart résidant à Marseille ; 40 519 Italiens dans le Var ; 4 495 dans les Basses-Alpes, département qui n’a guère plus d’une centaine de mille habitants ; 4 599 en Vaucluse ; 9 322 Italiens dans l’Isère.

Il se constitue ainsi dans le Midi de la France, entre les Alpes et le Rhône, de très forts groupements italiens, parfois énormes. Un romancier de talent, qui a particulièrement traité, dans ses récits, des choses et des hommes de la Méditerranée, M. Louis Bertrand, aécrit un roman intitulé : L’Invasion, qui dépeint la venue en grande masse des Italiens dans la Provence et dans le Dauphiné.

Si l’on réfléchit que les 1 132 000 étrangers recensés en France en 1911, auxquels il faut ajouter 230 000 naturalisés environ, soit ensemble 1 360 000 personnes de nationalité ou d’origine étrangère toute récente, se sont fixés en notre pays à une époque où la population proprement française, tout en étant peu prolifique, augmentait encore légèrement chaque année par un excédent modique des naissances sur les décès, quel ne sera pas l’accroissement de cet élément étranger ou d’origine étrangère dans la période qui commence et qui va être signalée, sauf changement rapide dans la mentalité française, par un excédent constant et croissant des décès sur les naissances.

La population française, en laissant de côté l’immigration, paraît devoir perdre, dans une dizaine ou une quinzaine d’années, sinon auparavant, une centaine de mille âmes par an ; il est vraisemblable que l’immigration comblera cette lacune. On doit donc s’attendre à voir le nombre des étrangers résidant en France et des naturalisés, qui est aujourd’hui de 1 360 000, doubler, tripler, ultérieurement quadrupler et quintupler ; ce sera 2,5 millions d’étrangers et de naturalisés, puis 4 millions, plus tard 5,5, ensuite 6,5 millions et avant la fin du siècle peut-être une dizaine ou une douzaine de millions d’étrangers et de naturalisés, non pas dispersés uniformément sur toute la superficie du pays, mais concentrés en grandes masses, en véritables colonies formant des sociétés presque exclusives, à nationalitéet à langue déterminée dans certains quartiers et dans certaines industries des grandes villes, et dans une vingtaine de départements, voisins chacun de la nation à laquelle ces différentes colonies d’émigrants appartiennent par leur origine. Dans nombre de ces départements, l’élément étranger arrivera à équivaloir, numériquement, à l’élément d’origine française puis à dépasser celui-ci.Les territoires entre les Alpes et le Rhône, ancienne Provence et ancien Dauphiné, risqueront d’être en grande partie italianisés ; de même, ceux entre le Rhône et l’Atlantique, voisins des Pyrénées, risquent d’être hispanisés. La flaminganisation des départements du Nord et du Pas-de-Calais, du moins, en ce qui concerne le premier de ces départements, des arrondissements frontières, a de grandes chances de s’effectuer. Et qui sait si l’Allemagne, finissant par souffrir de l’encombrement n’arrivera pas à déverser des colonies germaniques dans nos départements de Lorraine, de Champagne, de Franche-Comté et même de Bourgogne ?

Ces colonies étrangères en France, ayant chacune une population compacte considérable appartenant à la même nationalité d’origine, constituées d’ailleurs dans le voisinage immédiat de cette nationalité, recevant d’elle sans cesse des recrues nouvelles, ayant conservé le sentiment national, la langue nationale, les mœurs nationales, l’orgueil national, peuvent arriver à constituer, dans la France de la frontière, de considérables corps étrangers permanents, presque imperméables à la langue française et encore plus à la mentalité de la France.

Les chances d’assimilation ici sont très faibles ; les conditions d’assimilation sont beaucoup plus défavorables ici que dans les époques historiques écoulées, où les immigrants avaient perdu tout esprit national et n’avaient plus aucun lien avec leur pays d’origine.

Il est douteux que, si des colonies étrangères compactes, chacune d’une seule nationalité, se forment ainsi dans nos départements frontières et dans des quartiers spéciaux de nos grandes villes, on puisse éliminer complètement parmi elles leur langue d’origine et y substituer complètement la langue française.

Aussi doit-on conclure que, s’il ne se produit un changement prompt et profond dans la mentalité française, relevant parmi nous la natalité ou tout au moins la préservant d’un nouveau déclin, la France ne pourra éviter la dépopulation qu’en subissant la dénationalisation et cette dénationalisation peut s’effectuer très rapidement, en quatre ou cinq générations[5].

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[1] Nous avons établi que le nombre d’enfants par mariage, qui était de 3,09 et 3,03 dans les périodes d’années 1876-1880 et 1881-1885 et encore de 2,96 dans la période 1886-1890, puis de 2,72 dans la période 1890-1900, était tombé à 2,50 par mariage dans la période de 1901-1905, à 2,32 dans celle de 1906-1911, et seulement 2,18 par la baisse de la natalité de 1911, avec tendance à un déclin nouveau. Une statistique officielle qui vient d’être publiée (novembre 1912) sous le titre : Les familles françaises et les enfants, pourrait être invoquée par des personnes inexpérimentées comme donnant des résultats plus favorables ; mais, en réalité, elle n’infirme aucunement nos données et nos conclusions. Cette statistique repose, en effet, sur le recensement de 1906 : outre que les déclarations aux recensements sont loin d’offrir une exactitude absolue, il s’agit là de familles constituées il y a déjà un certain temps et même pour le plus grand nombre il y a déjà longtemps. D’après le recensement de 1906 (vieux de près de 7 ans), on comptait 293 enfants légitimes nés vivants par 100 familles dont 219 encore vivants au moment du recensement. Mais ces moyennes s’appliquent à des familles dont aucune n’a été constituée depuis 1906 et dont la plupart ont été constituées au siècle dernier, alors que la stérilité familiale était beaucoup moins accentuée que dans les années récentes. On ne saurait trop répéter que, par la baisse de la natalité actuelle, le nombre d’enfants par 100 mariages ne dépasse pas 218 et qu’il a une tendance marquée à diminuer encore, ce qui doit le faire tomber assez rapidement au-dessous de la moyenne de 2 enfants par mariage.

[2] Aux termes de cette loi sont Français : 1° tout individu né d’un Français en France ou à l’étranger ; 2° tout individu né en France de parents dont la nationalité est inconnue ; 3° tout individu né en France d’un étranger qui lui-même y est né ; 4° tout individu né en France d’un étranger et qui, à l’époque de sa majorité, est domicilié en France, à moins que dans l’année qui suit sa majorité, telle qu’elle est réglée par la loi française, il n’ait décliné la qualité de Français et prouvé qu’il a conservé la nationalité de ses parents.

[3] Certains de ces chiffres sont des chiffres ronds, comme celui des étrangers à Paris, et, par cette raison, sans doute des chiffres approximatifs : nous n’en sommes pas responsables et nous reproduisons textuellement les données du document officiel.

[4] Disons, en ce qui concerne les Belges, et cela pourra être ultérieurement aussi le cas pour les Suisses, les Italiens et les Espagnols, qu’une nouvelle organisation du travail belge en France vient de se produire. Un nombre croissant d’ouvriers belges, conservant leur résidence en Belgique, viennent chaque matin, par les voies ferrées, travailler dans les villes industrielles ou les campagnes de notre département du Nord et retournent chaque soir chez eux. Avec la brièveté de la journée de travail qui tend à n’être plus que de neuf à dix heures, ces ouvriers belges peuvent faire dans chaque sens 40 à 50 kilomètres par jour pour se rendre au travail en France ; des dizaines de mille et ultérieurement des centaines de mille ouvriers belges peuvent se mettre à ce régime. Notre Chambre des députés avait, dans une de ses récentes sessions, voté une taxe de cinquante centimes par jour sur les ouvriers belges ainsi non résidant : mais sur les représentations du gouvernement belge le gouvernement français a dû l’abandonner, reconnaissant qu’elle est contraire aux conventions internationales.

[5] Un député des Basses-Alpes, M. Honnorat, proposait une mesure qui pourrait aider à rompre le lien entre les étrangers résidant en France, naturalisés ou non et leur patrie d’origine : ce serait de les autoriser à franciser leur nom ; ainsi, disait-il, il y a dans les Basses-Alpes, beaucoup de résidants, d’origine italienne, s’appelant Cavalieri : on pourrait les autoriser et même les inviter, lors de leur naturalisation, à s’appeler Cavelier ou Cavalier : sans attacher à cette motion une importance de premier ordre, il serait prévoyant de l’adopter.

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