A offrir pour les fêtes (2) Le socialisme en chemise brune. Un livre de Benoît Malbranque.

Par Damien Theillier*

Si vous cherchez un bon livre à offrir à Noël, je vous en recommande un tout particulièrement. Alors que des milliers et des milliers de pages ont été publiées sur l’extermination des Juifs, la composante socialiste du nazisme a fait l’objet de peu d’attention. Le livre de Benoît Malbranque, Le socialisme en Chemise Brune, vient combler utilement cette lacune.

Saviez-vous que les Nazis ont institué un système d’État-providence que de nombreux historiens ont comparé au Welfare State inspiré par William Beveridge ? Dans Mein Kampf, Hitler a longuement salué la nécessité d’un mouvement syndical puissant et influent pour en finir avec l’exploitation capitaliste. Il créa ainsi un syndicat géant, le Front du travail, en 1933.
Dans un discours du 1er mai 1927, il proclame : « Nous sommes socialistes, et ennemis du système économique capitaliste actuel, qui exploite les économiquement faibles, avec ses salaires injustes, qui évalue un être humain selon sa richesse et ses biens et non selon la responsabilité et la performance, et nous sommes déterminés à détruire ce système à tout prix ».
Écrit comme une enquête policière, dans un langage clair et agréable, ce livre s’attache à détruire un par un les mythes populaires qui ont trop longtemps collé aux chaussures de l’historiographie du nazisme.
Ainsi, l’aversion d’Hitler et des Nazis pour les communistes, les marxistes et les bolcheviks est fréquemment utilisée par les historiens pour contrer la thèse qui fait l’objet de ce livre, à savoir que le national-socialisme était un mouvement socialiste.
Comme l’a montré Ludwig von Mises, l’apport original du nazisme ne se situe pas sur le plan idéologique, mais sur celui de l’exécution : « Les principes fondamentaux de l’idéologie nazie ne diffèrent pas des idéologies sociales et économiques généralement acceptées. La différence concerne seulement l’application de ces idéologies aux problèmes spéciaux de l’Allemagne. » Et dès 1933, F. A. Hayek écrivait : « la persécution des marxistes et des démocrates en général, tend à occulter le fait fondamental que le National-Socialisme est un véritable mouvement socialiste, dont les idées principales sont le fruit des tendances antilibérales qui ont progressivement gagné du terrain en Allemagne depuis la fin de l’époque bismarckienne. »
Telles sont les idées fondamentales qui ont guidé Benoît Malbranque dans la rédaction de ce volume, commencé il y a plusieurs années, alors qu’il suivait ses cours d’histoire au lycée. S’appuyant sur des travaux d’historiens anglo-saxons contemporains comme Adam Tooze (The Wages of Destruction) ou Gunter Reimann (The Vampire Economy. Doing Business Under Fascism), il montre que ce que rejette Hitler dans le communisme, ce n’est pas son socialisme, c’est son origine juive et sa tendance internationaliste. Et c’est pour les mêmes raisons qu’Hitler condamne le capitalisme. Le capitalisme libéral, mondialisé, financiarisé, était pour lui le mal absolu. Or les Juifs en étaient à la fois les créateurs et les maîtres absolus. Le capitalisme, pensait Hitler, était un système essentiellement Juif.
De même, le bolchevisme était considéré par les nazis comme une création essentiellement juive. Bien qu’ayant largement versé dans l’antisémitisme, Karl Marx était lui-même d’origine juive, et même le descendant d’une longue lignée de rabbins. C’est pourquoi, écrit Benoît Malbranque, « la source des divergences entre nazisme et communisme n’est pas à trouver dans la doctrine socialiste mais dans ce qui l’entoure, et notamment l’esprit nationaliste. Le communisme, selon Hitler et selon les Nazis, n’était pas antilibéral jusqu’au bout ». Comme l’a bien fait remarquer Hayek, les nazis « ne s’opposaient pas aux éléments socialistes du marxisme, mais à ses éléments libéraux, à l’internationalisme et à la démocratie. »
Si donc Hitler a dénoncé le marxisme comme un « faux » socialisme d’origine juive, ce fut pour mieux construire une économie socialiste dans laquelle chacun agirait pour le bien-être de la collectivité. C’est ainsi que de la législation sociale à la fiscalité, de la politique environnementale à la réglementation des entreprises, il fut un architecte de peuple et un dessinateur de nation. Il voulut façonner non seulement l’économie allemande mais aussi chaque sphère de la vie individuelle, partant du principe que l’individu n’est qu’un agent de l’État et qu’il doit se mettre au service du bien commun, c’est-à-dire du bien de l’État.
Tout comme le système économique allemand, la vie sociale des Allemands fut également collectivisée. L’État prit à sa charge les activités sportives, les manifestations culturelles et tout le temps de loisir. Il y eu plus d’État dans la culture, le gouvernement se chargeant de subventionner grassement les manifestations culturelles « dignes » de l’Allemagne et de proscrire les autres.
Le ministère de l’Éducation du Reich se chargea d’édicter les programmes et les manuels furent réécrits. Anciennement assurée par les écoles confessionnelles, l’éducation des jeunes Allemands fut désormais une mission d’État. Les professeurs devinrent des fonctionnaires du gouvernement. Or tout cela, cet État si large, disposant de pouvoirs si grands, si étendus, n’était-ce pas là le grand rêve des socialistes ?
Une autre objection est souvent entendue : les socialistes n’ont jamais parlé de la « race » et le racisme est contraire au socialisme. Mais comme l’explique bien Benoît Malbranque, le racisme lui-même est une idée collectiviste : il ne peut s’établir que dans un esprit qui considère que chacun appartient à un groupe particulier. Pour reprendre les mots du représentant au Congrès américain Ron Paul, « le racisme n’est qu’une affreuse forme de collectivisme, une façon de considérer les hommes comme faisant partie de groupes plutôt que comme étant des individus. Les racistes considèrent que tous les individus qui partagent des caractéristiques physiques superficielles sont pareils : étant collectivistes, les racistes ne pensent qu’en termes de groupes ».

A lire aussi : l’interview de l’auteur sur Contrepoints

2 Réponses

  1. hanouka

    Ce n’est pas un livre que j’offrirais pour Noel , mais je suis curieux et vais le lire pour ma connaissance personnelle

    Répondre

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