Abstractions

Dictionnaire de la tradition libérale française, par Benoît Malbranque

ABSTRACTIONS. Pour des intellectuels, c’est un mal nécessaire que de concevoir des abstractions. Ceux qui n’admettent pas les principes, qui refusent les théories et craignent les théoriciens, en sont toujours réduits à se conduire d’après les enseignements de leur « pratique sans théorie et sans principe », comme le lançait Bastiat aux protectionnistes. (Pétition des fabricants de chandelles, etc., 1845 ; O.C., t. IV, p. 57) Les libéraux français, pourtant, se méfient des mots vides de sens. Le même Bastiat craint la « grande fiction » de l’État, et plusieurs décennies plus tard, Yves Guyot assiste à l’éclosion d’une collection d’expressions trompeuses de la part des défenseurs de l’interventionnisme. « Quand ils ont fait une métaphore sur la justice, sur les devoirs du patron envers ses ouvriers, dont il est le père et qui sont sa famille, sur les devoirs de l’État qui doit être aussi un bon père de famille, et qu’ils ont ajouté l’épithète de ‘sociale’ au mot de justice, ils se figurent avoir dit quelque chose. En réalité, ils ont masqué le défaut de précision de leurs idées sous la draperie bariolée qu’ils ont agitée devant le public. » (« La métaphore sociale », Le Siècle, 13 octobre 1894) Les économistes libéraux français, Jean-Baptiste Say en tête, ont aussi blâmé David Ricardo et l’école anglaise d’économie politique pour leur usage excessif du langage abstrait (Voir Économie politique et Angleterre).

A propos de l'auteur

Benoît Malbranque est le directeur des éditions de l'Institut Coppet. Il est l'auteur de plusieurs livres, dont le dernier est intitulé : Les origines chinoises du libéralisme (2021).

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