Ce que la science économique n’est pas

Le malentendu le plus fréquent au sujet de la science économique est qu’il ne s’agirait que d’argent et de commerce. C’est une erreur fatale, car, comme le dit Mises, la science économique concerne tout un chacun. C’est l’essence même de la civilisation.


Ce que la science économique n’est pas

par Llewellin H. Rockwell, Jr.

Paru le 11 février 2006 sur le site  www.LewRockwell.com

Traduit par Jacques Peter, Institut Coppet.

 

Le malentendu le plus fréquent au sujet de la science économique est qu’il ne s’agirait que d’argent et de commerce. L’étape suivante est facile : je m’intéresse à autre chose que simplement l’argent, et cela devrait être le cas pour tout le monde, alors laissons l’économie aux agents de change et aux gestionnaires de fortune et ne nous occupons pas de ses enseignements.

C’est une erreur fatale, car, comme le dit Mises, la science économique concerne tout un chacun. C’est l’essence même de la civilisation.

Cette confusion a été semée par les économistes eux-mêmes qui posent le principe de quelque chose appelé « l’homme économique » qui jouit de la propension psychologique à se comporter toujours de façon à maximiser sa fortune. Leurs modèles mathématiques, leurs prévisions et leurs analyses se basent sur cette idée.

Néanmoins, dans le monde réel, nous savons que ce n’est pas le cas. Le monde que nous connaissons comprend la recherche du profit mais aussi d’extraordinaires actes de charité, de sacrifice, de don non monétaire et de volontariat (encore que je n’aime pas ce terme puisque tous les échanges commerciaux sont également volontaires !).

Comment les prendre en compte ? L’approche Autrichienne de la science économique se passe de la notion « d’homme économique », ou plus exactement étend la signification de la science économique à toute action qui a lieu dans un cadre de pénurie. La pénurie veut que nous économisions quelque chose dans tout ce que nous faisons, même si le gain financier n’est pas le mobile. Pour cette raison les Autrichiens analysent des individus agissants, non des prototypes d’accumulateurs.

Pourquoi est-ce important ? Un reproche fréquent fait au marché libre est qu’il doit être complété par des lois qui limitent le pouvoir du matérialisme débridé. Les gens admettent que le marché convient bien à l’avidité mais nous avons besoin du gouvernement pour produire la charité, l’ordre, la loi, et toutes sortes de contraintes, comme si ces domaines étaient en dehors du champ de l’économie.

En réalité, une construction théorique qui explique les bourses mais pas les ventes aux enchères de charité, les chaînes de magasins mais pas la fréquentation des églises, les taux d’épargne mais pas l’éducation des enfants, ne peut prétendre être une théorie universelle.

C’est pourquoi cet article de Rothbard est si important. Il définit le marché libre comme intégré à une société libre qui s’ordonne et se développe à travers l’action coopérative de tous ses membres. Il montre que l’action n’est pas seulement conditionnée par la recherche du profit, mais par les institutions de la propriété, du contrat et de la libre association.

La science économique est donc une science qui est enracinée dans une compréhension plus vaste de ce qu’on appelait jadis l’ordre libéral. La revendication centrale de cette compréhension est que la société — ainsi que sa partie plus petite souvent appelée « l’économie » — n’a pas besoin d’une gouvernance centrale pour s’épanouir.

Et de même que les structures économiques sont le mieux gérées par les propriétaires et les marchands, la société dans son ensemble contient dans son sein la capacité d’auto-gestion. Toute tentative d’entraver son fonctionnement par la coercition de l’État ne peut que créer des distorsions et réduire la richesse de tous.

Quiconque est familier des textes économiques et des publications actuels sait que ce n’est pas cette vue qui est mise en avant. Ils en sont restés à une époque où les bureaucrates se croyaient plus malins que le reste d’entre nous, où les banquiers centraux croyaient qu’ils pouvaient arrêter le cycle économique et créer juste assez de monnaie pour produire de la croissance mais sans déclencher l’inflation, où les experts en position dominante savaient exactement quelle devait être la taille des entreprises.

Mais les décideurs gouvernementaux savent-ils, mieux que les propriétaires, comment prendre les décisions quotidiennes sur la production et les allocations de ressources ? Peuvent-ils améliorer les accords, innovations et règles créés par des individus agissants ? Ils ne disposent ni du bagage intellectuel ni de l’incitation pour le faire. Ils sont aveugles aux réalités de nos vies et incapables de faire davantage pour nous que nous ne le pouvons nous-mêmes, même s’ils avaient envie de faire plus que de nous voler et nous contraindre.

Comment se fait-il que la profession de science économique en soit venue à ne pas voir ces points ? Murray Rothbard pensait que c’était dû en partie au déclin des grands traités de théorie économique, des livres systématiques qui commencent avec les notions fondamentales et déroulent les causes et les effets à travers toute la gamme de l’action humaine.

Ces livres étaient courants au 19ème siècle (et nous avons diffusés des livres comme Le Traité d’Economie Politique de J.B. Say, et un livre similaire de Frank Fetter !). Dieu merci, Mises a écrit son œuvre extraordinaire Human Action, et Rothbard a élaboré l’économie misesienne dans Man, Economy, and State. L’institut Mises a publié les deux.

Le saviez-vous ? Ils continuent à être lus, enseignant chaque nouvelle génération d’économistes grâce au travail du Mises Institute. Et pas seulement aux États-Unis : nous recevons régulièrement les états d’avancement de groupes d’étude en Chine, en Amérique Latine, en Europe de l’Est et en Afrique. Une théorie universelle a une fois de plus un impact universel.

 

 

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