Une biographie utile de Benjamin Constant

Une biographie utile de Benjamin Constant

Léonard Burnand, Benjamin Constant, Perrin, 2022.

Léonard Burnand — l’un des collaborateurs de la remarquable collection des Œuvres complètes de Benjamin Constant, toujours en cours, et qui permet depuis la fin du siècle dernier une connaissance accrue et renouvelée de cet auteur majeur du libéralisme français — a publié cette année, sous le titre modeste de Benjamin Constant, une biographie très instructive, dont on doit reconnaître toute l’utilité. Puisant aux meilleures sources, et employant au besoin des manuscrits retrouvés par lui-même, il apporte des éclairages toujours sûrs, et parfois nouveaux, sur les différents aspects de la vie de Constant : vie troublée, comme la personnalité de l’homme lui-même, mais peut-être moins chaotique que son temps. Ainsi, par exemple, la personnalité d’Henriette de Chandieu, sa mère, est pour la première fois étudiée. À cet égard, l’auteur a droit à notre gratitude. Au sein de notre époque, traversée par des déboires que Benjamin Constant avait si finement étudiés — de « l’esprit de conquête » aux empiétements du pouvoir sur la sphère propre de l’individu —, la connaissance de son parcours est un bien précieux à acquérir, et Léonard Burnand se présente à nous comme un bon guide. 

Son style littéraire démocratique, et sa manière un peu américaine de s’acquitter de sa tâche, le feront apprécier par ceux qui demandent avant tout à une biographie d’instruire, et qui se mettent peu en peine si un auteur n’élève pas en même temps leur âme. Aussi n’appuierai-je pas sur ce point mes critiques. J’aurais à lui reprocher plutôt son insistance à faire de Constant un Suisse et de le nommer toujours « le Vaudois » ou « le Lausannois ». À de certains égards, Benjamin Constant, de même que Germaine de Staël, sont des Européens. À force de volonté et de souplesse, on peut parvenir à les rattacher davantage à tel pays, dont ils médisaient et où ils se sont tant ennuyés, ou à tel autre, qu’ils ont servi après avoir lutté pour faire reconnaître leurs droits ; mais ce sont là des querelles nationales, et les protestations intéressées souvent n’intéressent pas : on leur répond comme Molière, vous êtes orfèvre, Monsieur Josse. 

Benoît Malbranque

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