In memoriam Michel Drancourt (1928-2014)

Monsieur DrancourtCe mois de mai 2014, nous avons appris la disparition de Michel Drancourt, à l’âge de 86 ans. Economiste et essayiste, il fut un grand ami de la liberté, dans la tradition française de toujours.

Par Jean-Pierre Chamoux

Michel Drancourt nous a quittés il y a quelques jours. Nous perdons avec lui un très fidèle soutien du Comité Jean Fourastié et un continuateur de son action dont la riche personnalité et les engagements professionnels multiples méritent l’admiration.

Né dans le nord, d’une famille industrielle, il fut en partie élevé à Périgueux dans son jeune age, en raison de l’exode de sa famille ; puis à Strasbourg où il fit une partie de ses études de droit et de sciences politiques. Il resta fidèle à ces deux attaches provinciales, l’Alsace et le Périgord, qui conditionneront des aspects importants de sa vie.

Journaliste au magazine “Entreprise” à partir de sa fondation en 1953, ainsi qu’à la revue “Réalités“, Michel Drancourt a joué un rôle de premier plan dans ce groupe de presse original qui initia la  presse économique d’après-guerre en France, sous la direction de ses inspirateurs Didier Rémon et Humbert Frèrejean. Il rencontra, au sein de ces rédactions, des personnalités qui entraineront sa carrière et ses engagements au delà de la presse et feront murir en lui des qualités qui justifieront ses responsabilités ultérieures : il collabora notamment avec Robert Schuman qui était chroniqueur régulier de la revue ; et avec Louis Armand dont il resta toute sa vie un grand admirateur, avec lequel il rédigea des ouvrages marquants, ré-édités en 2007 (Plaidoyer pour l’avenir en 1961et Le pari européen en 1968).

Journaliste de l’écrit, il a porté pendant toute sa vie un regard libéral et critique sur les questions  d’économie politique et de société. Mais il pratiqua aussi le journalisme audiovisuel comme chroniqueur économique à de grandes émissions comme Panorama (RTF), participant ainsi, comme Jean Fourastié lui-même, très activement à la découverte des thèmes économiques par le grand public.

Il exerça des responsabilités politiques sous la présidence Pompidou comme Commissaire à la conversion industrielle de Lorraine (1969 à 1973), démontrant ainsi son aptitude à passer de la chronique à l’action publique. Relayant l’exemple paternel, il s’engagea ensuite dans une voie industrielle, d’abord à la direction de la Télémécanique (1972 à 1976) ; il assura des responsabilités syndicales au Groupement des industries électriques avant d’animer longtemps l’Institut de l’entreprise, fondé par Jean Chenevier en 1975, un centre de réflexion patronal à long terme associant à ses travaux des experts et des universitaires pour analyser de grands thèmes de société (1976 à 1993).

Il entraina avec lui dans cette aventure de nombreux et brillants analystes comme Armand Braun, Alain Bienaymé, André Fourçans, Georges Guéron, Henri Lepage, Jacques Plassard, grâce au soutien actif de fortes personnalités comme Alain Chevalier, François Dalle, Octave Gélinier, Olivier Lecerf, Nicolas Thiéry et beaucoup d’autres. Cette période très riche restera sans doute l’œuvre maitresse de Michel Drancourt.

Il revient ensuite à l’industrie comme administrateur et comme conseiller d’entreprises, notamment aux Construction industrielle de la Méditerranée (CNIM). Il se dévoua avec une grande énergie pour animer les Entretiens de Dauphine et un séminaire doctoral sur l’histoire de l’entreprise à l’IAE de Caen (1996 à 2007). Il reprend la plume pour des chroniques régulières à La Croix, à la revue Futuribles, siégeant à son comité éditorial, à Sociétal fondé en 1996 par Albert Merlin et pour d’autres journaux comme Les Echos. Il publia régulièrement des essais concernant l’entreprise, sa gestion, l’histoire économique et même l’écologie (Les arbres ne poussent pas jusqu’au ciel, 2003 ).

Travailleur infatigable, ouvert et curieux, toujours disponible pour répondre aux sollicitations de ses nombreuses et confiantes relations, Michel Drancourt cultivait aussi un jardin secret dans son Périgord d’adoption : la restauration patiente d’un belle bâtisse historique dans laquelle il avait investi des années de soins et d’épargne, qu’il aimait faire découvrir à ses proches comme le font la plupart des mécènes.

Jean-Pierre Chamoux 10 mai 2014.

A lire :

Quelques uns de ses articles en 2006-2007 : //www.debat2007.fr/blog/index.php?u=mdrancourt

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