La Ligue, ses commencements, son but et son organisation. Par Joseph Garnier (1845)

Richard Cobden, par Lowes Cato Dickinson

Richard Cobden, par Lowes Cato Dickinson

« L’aristocratie anglaise dut bien certainement comprendre la portée de ce cri : abolition immédiate des corn-laws ; mais en Europe et en France, la Ligue luttait depuis des années et elle grandissait à vue d’œil, que nous ne prenions encore ce mouvement que pour quelque chose d’analogue à l’agitation produite ici par le tarif du sésame. Quand les journaux français inséraient par hasard une nouvelle à ce sujet, nous cherchions à expliquer l’importance que les Anglais mettaient à une question tout à fait spéciale. Nous ne savions pas que l’Anti-corn Law-League demandait la liberté absolue du commerce des grains ; nous ne savions pas qu’elle demandait en même temps l’affranchissement des échanges, c’est-à-dire qu’elle proclamait une des plus grandes vérités de l’économie politique, vérité dont l’application doit assurer la paix et accélérer les progrès de la civilisation. Il a fallu, pour que les économistes se rendissent bien compte de la révolution qui se préparait en Angleterre, que M. Bastiat arrivât des Landes pour mettre sous nos yeux ébahis la traduction des discours des ligueurs et nous révéler tout un monde dans son livre intitulé : Cobden et la Ligue. » — Joseph Garnier


La Ligue, ses commencements, son but et son organisation

(Richard Cobden, les ligueurs et la Ligue, par Joseph Garnier, éd. Guillaumin, Paris, 1845 ; chapitre 2)

Crise dans les districts manufacturiers, en 1839, 1840, 41, 43 ; ses conséquences. — On cherche la cause du mal dans le monopole du blé. — Curieux meeting de Bolton. — Symptômes de ligue. — Mémorable discussion à la chambre de commerce. —La pétition de Cobden, demandant le rappel des lois céréales et l’affranchissement du commerce est adoptée. — Première souscription en faveur de l’agitation. — Insuccès de cette pétition au parlement. — Comment l’agitation prend le nom d’Anti-Corn-Law-League. — Pourquoi nous ne comprenons que très tard la portée de ce mouvement en France. — Les écrits de MM. F. Bastiat, Léon Faucher et Al. Fonteyraud sont de véritables révélations. — Révolution qu’entraîne le rappel des lois céréales. — Aperçu de la constitution économique de la Grande-Bretagne. — Grandeur des projets de la Ligue. — Organisation intérieure. — Division du travail, etc.

C’était vers la fin de 1838, des symptômes sinistres faisaient présager une de ces crises manufacturières qui sont les fléaux des peuples industriels, et qui doivent perdre de leur intensité avec le régime de la liberté, comme la peste fuit des cités où d’intelligents édiles font circuler l’air et la lumière.

Cette crise a duré pendant les quatre années 1839, 1840, 41 et 42. Elle fut produite par celle des États-Unis, qui avait amené la langueur dans les manufactures anglaises, et la mauvaise récolte de 1838. Sous l’influence simultanée de ces deux causes le travail manqua, le prix du blé augmenta et les salaires baissèrent rapidement. La misère fut affreuse jusqu’en 1843. Avec la misère, l’émeute, l’incendiarisme, des bandes de malheureux errant sur les routes, les maladies, les morts violentes[1] et tous les fléaux qu’entraînent de pareilles catastrophes.

Que faire pour remédier à tant de maux ? Comment mettre fin à la crise ?

Avant tout, il fallait obtenir le pain à bon marché, et la grande voix des manufactures désigna la loi des céréales comme l’obstacle sur lequel il fallait diriger les premiers coups.

Le 4 août 1838, un homme de bonne volonté, le docteur Birney, convoque un meeting dans le théâtre de Bolton. Mais en présence du public, il se trouve trop faible pour sa tâche, et l’assemblée allait se séparer au milieu des rires et des quolibets, lorsqu’un jeune homme s’avança sur l’estrade et commanda le silence. C’était M. Paulton, qui plus tard fut l’un des principaux ligueurs, rédacteur en chef du journal the League et secrétaire de l’Association à Londres. M. Paulton fit la critique des Corn-Laws avec un plein succès, et répéta son instruction pendant plusieurs jours de suite[2]. À peu près en même temps, le docteur Bowring, qui avait depuis plusieurs années rempli une mission commerciale officielle sur les deux continents, parcourait, en y faisant de la propagande économique, les districts manufacturiers de l’ouest. De passage à Manchester, il fut invité à une soirée où se trouvaient plusieurs manufacturiers de la ville. On parla de l’événement de Bolton, et on jeta la base d’une association contre la loi céréale (anti-corn-law-association). Le docteur Bowring, M. Paulton, M. Prentice, rédacteur du Manchester-Times, et M. J.-B. Smith, riche manufacturier et membre de la chambre de commerce de Manchester, organisèrent des meetings dans cette dernière ville, à Birmingham, à Wolverhampton, à Coventry, à Leicester, à Nottingham et à Derby. Aux applaudissements des assemblées, les parrains de la doctrine du colonel Thompson (auteur du catéchisme contre les lois céréales) purent juger de l’avenir qui s’ouvrait devant elle. M. Smith, de retour à Manchester, fit convoquer la chambre des communes (13 décembre 1838) pour délibérer sur une pétition au parlement qui aurait pour objet l’abolition entière et immédiate de la loi sur les grains. Cette pétition était l’œuvre de Richard Cobden. La discussion fut solennelle ; elle occupa sept séances. Le président de la chambre, M. Wood, membre du parlement, proposait, tout en faisant la critique de la législation sur les céréales, de laisser au gouvernement (alors whig) le soin de la modifier. Cette motion, vivement soutenue, mais plus vigoureusement combattue, ne fut pas adoptée, et la chambre du commerce de Manchester, composée de l’élite des manufacturiers, déclara, sur la proposition de Cobden, que :

« Sans l’abolition immédiate des lois sur les grains, la ruine des manufactures était inévitable, et que l’application, sur la plus grande échelle, du principe de la liberté commerciale pouvait seule assurer la prospérité de l’industrie et le repos du pays. »

En Angleterre, les actes suivent les paroles. Une première mise de fonds produisit en février 1833 mille livres (23 000 fr.). On fonda un organe spécial pour la cause, l’Anti-bread tax Circular[3], dans lequel Cobden se chargea de poser nettement la question ; et des délégués furent envoyés à Londres, qui devaient, au nom des districts manufacturiers, présenter la pétition de la chambre du commerce au parlement et demander à se faire entendre à sa barre.

Mais les communes ayant rejeté la motion qui en fut faite par M. Villiers[4], les délégués eurent à délibérer sur le parti qu’il y avait à prendre.

Dans le cours de la discussion, Cobden cita l’exemple des villes Hanséatiques et conseilla de former une ligue entre les villes de l’Angleterre contre l’aristocratie qui les gouvernait, qui ruinait leur industrie et qui refusait de les écouter.

« De nos grandes villes, s’écria-t-il, formons une Ligue destinée à renverser les iniquités de notre aristocratie féodale, et que les châteaux écroulés du Rhin et de l’Elbe soient pour nos adversaires comme une révélation du sort qui les attend s’ils persistent dans leur lutte contre les classes industrielles du pays. »

— Une ligue contre la loi céréale (an anti corn Law-League) ? dit quelqu’un dans l’assemblée.

Yes, reprit M. Cobden, AN ANTI CORN LAW-LEAGUE!

L’aristocratie anglaise dut bien certainement comprendre la portée de ce cri : abolition immédiate des corn-laws ; mais en Europe et en France, la Ligue luttait depuis des années et elle grandissait à vue d’œil, que nous ne prenions encore ce mouvement que pour quelque chose d’analogue à l’agitation produite ici par le tarif du sésame. Quand les journaux français inséraient par hasard une nouvelle à ce sujet, nous cherchions à expliquer l’importance que les Anglais mettaient à une question tout à fait spéciale. Nous ne savions pas que l’Anti-corn Law-League demandait la liberté absolue du commerce des grains ; nous ne savions pas qu’elle demandait en même temps l’affranchissement des échanges, c’est-à-dire qu’elle proclamait une des plus grandes vérités de l’économie politique, vérité dont l’application doit assurer la paix et accélérer les progrès de la civilisation. Il a fallu, pour que les économistes se rendissent bien compte de la révolution qui se préparait en Angleterre, que M. Bastiat arrivât des Landes pour mettre sous nos yeux ébahis la traduction des discours des ligueurs et nous révéler tout un monde dans son livre intitulé : Cobden et la Ligue[5]. Il a fallu, pour que nos feuilles politiques et l’opinion publique se préoccupassent un peu plus du grand mouvement économique en Angleterre, que ce mouvement dominât les Chambres et les ministères. Oh ! alors, on s’est enquis de ce grand fait de la Ligue, et nous avons commencé à voir la force irrésistible qui poussait Robert Peel à proposer de si grandes réformes au parlement.

Le rappel immédiat de la loi céréale, était une révolution, une grande révolution ; l’écho, à un demi-siècle d’intervalle, de la nuit du 4 août ; la chute de l’aristocratie britannique dans toutes ses ramifications.

« Si le code financier de l’Angleterre, disait un jour Cobden, pouvait parvenir dans la lune, seul et sans aucun commentaire historique, il n’en faudrait pas davantage pour apprendre à ses habitants qu’il est l’œuvre des landlords, des seigneurs maîtres du sol. »

En effet, voici comment on peut résumer les résultats de la constitution anglaise, telle que l’ont faite les temps accomplis.

Les aînés de l’aristocratie possèdent toute la surface du sol. L’impôt foncier est presque nul ; il est du moins resté invariable depuis des siècles ; et bien que la rente des terres ait sextuplé, il n’entre que pour un vingt-cinquième dans les recettes publiques. La propriété immobilière est en outre affranchie des droits de succession, quoique la propriété mobilière y soit assujettie.

Les contributions indirectes ont été assises de manière à peser plutôt sur les objets consommés par les classes pauvres que sur ceux qu’achètent les classes riches.

Enfin la loi des céréales permet aux aînés de l’aristocratie de prélever un milliard de francs par an sur la nourriture du peuple anglais.

C’est aussi pour les cadets des mêmes familles que le gouvernement de la Grande-Bretagne, fidèle à cette politique punique que toutes les nations ont flétrie, a poursuivi le système colonial sur une immense échelle. Or ce système aboutit à plusieurs grands monopoles, c’est-à-dire aux lourds impôts sur la presque totalité des classes laborieuses, et il a pour but de créer des places, des missions, des commandements et des privilèges accordés à peu près exclusivement aux branches cadettes des grandes familles oisives, lesquelles prélèvent aussi les dîmes par l’intermédiaire de l’Église établie. Avec un vaste système colonial il faut des armées et un grand développement de forces maritimes. De là, et presque fatalement, ces guerres, ces injustices, ces cruautés qui ont rempli les derniers siècles. De là cette haine universelle accumulée, non sans raison, sur la perfide Albion !

C’est ce système que le parti de la Ligue a voulu frapper au cœur en attaquant le monopole des céréales ; c’est à ce plan que Robert Peel a, en dernier lieu, prêté les mains ; c’est le commencement de cette révolution que les communes et les lords ont acceptée dans la mémorable session qui vient de finir.

La loi des céréales était non seulement la clef de voûte de l’aristocratie terrienne ; mais encore celle de tout le système Protecteur en Angleterre, établi en faveur des manufactures, du commerce maritime et des colonies.

On a dit que les chefs de la Ligue n’avaient d’abord pas compris l’étendue de la réforme qu’ils demandaient, et qu’ils auraient, sans cela, reculé devant leur œuvre. On a dit aussi que la première levée de boucliers fut provoquée par les manufacturiers à la recherche d’un moyen de baisser les salaires de leurs ouvriers, sans autre pensée que celle de leur intérêt égoïste et étroit.

Ces assertions ne sont pas fondées. Le premier prédicant du rappel des corn-laws est le colonel Thompson qui n’est pas manufacturier, mais économiste. La mémorable pétition de la chambre de commerce de Manchester, rédigée par Cobden, proclame solennellement, nous venons de le voir, que l’application, sur la plus grande échelle, du principe de la liberté commerciale peut seule assurer la prospérité de l’industrie et le repos du pays. Et plus tard la Ligue n’a-t-elle pas demandé solennellement par sa résolution de mai 1845 l’abolition totale et immédiate et sans condition[6] de tous les monopoles, de tous les droits protecteurs quelconques, en faveur de l’agriculture, des manufactures, du commerce et de la navigation, en un mot, la liberté absolue du commerce, le FREE-TRADE ?

Sans doute, les membres de cette vaste association n’ont pas tous compris, ni tous vu avec la lucidité des chefs ; tous n’ont pas souscrit dans des vues désintéressées. Mais ce sera l’éternel honneur de Cobden et de ses amis d’avoir instruit leurs adhérents, d’avoir instruit la masse du peuple anglais, d’avoir instruit les communes, d’avoir instruit la chambre des lords et d’avoir fait un tout solide et compact de ces éléments qui flottaient épars dans l’océan des erreurs économiques.

Mais reprenons l’histoire des développements de la Ligue, et signalons les points saillants de cette lutte qui a eu pour résultat la révolution que nous venons de caractériser.

L’organisation définitive de l’association était un fait accompli dès les premiers jours de l’année 1839. Manchester devint la métropole, autour de laquelle se groupèrent les autres districts manufacturiers. Un conseil exécutif de cinquante membres dirigea l’action et imprima le mouvement aux journaux, aux brochures, aux cours, aux meetings, à la correspondance, aux souscriptions, aux festivals, aux soirées.

En France, la composition d’un conseil exécutif, d’un comité, est toujours subordonnée à un règlement, à des statuts, à une charte dont la rédaction amène des discussions à perte de vue. Il arrive même souvent que lorsque la charte est votée, l’énergie a disparu, et que l’entreprise ne gît plus que sur le papier. Il paraît que les ligueurs de Manchester se sont très peu occupés de réglementer à l’avance une institution inconnue. Le conseil exécutif, composé des plus forts souscripteurs, et de ceux qui ont voulu donner le plus de soins à l’œuvre, a marché en s’inspirant des événements plutôt que des statuts ; et il lui est même arrivé, un jour qu’il a voulu recourir à son règlement primitif, de ne pas le retrouver. La loi, dans la lutte, c’est le chef qui a la confiance de tous : c’est ce que les souscripteurs comprirent de bonne heure. Ils purent, d’ailleurs, juger par la publicité des comptes et par l’énergie des efforts, que leur argent recevait l’emploi auquel ils le destinaient.

Cependant il se fit, au bout de quelque temps, dans le sein du conseil, une division spontanée et naturelle du travail, et chaque membre actif, soit au dehors, soit au dedans, se classa, conformément à son caractère, à ses moyens, à son talent[7].

M. Georges Wilson, la tête administrative par excellence, fut porté au fauteuil de la présidence, et dirigea l’action du conseil exécutif qui ne tarda pas à reconnaître dans Richard Cobden son chef intellectuel. Cobden, Bright, Fox, Villièrs, J.-B. Smith, Paulton, Ashworth, le colonel Thompson, James Wilson, Georges Thompson, etc., se tinrent prêts pour l’action et la propagande ; M. Prentice combattit dans le Manchester-Times; M. Hickin tint la plume au sein du conseil à Manchester ; M. Rawson devint le trésorier ; MM. Bickham et Wolley se dévouèrent au pénible travail de la correspondance ; M. Lees seconda le président pour les affaires matérielles de la Ligue[8], etc.

Les bureaux de l’association à Manchester ont produit, sur tous ceux qui les ont vus en activité, l’effet d’un grand ministère. Au fort de la lutte, les membres du conseil y venaient une fois tous les jours, et quittaient pendant quelques heures leurs affaires pour se rendre, l’un au comité des élections, l’autre au comité de la correspondance, celui-ci au comité du commerce, celui-là au comité des finances, etc. À ces comités se rattachaient en dehors des sous-comités d’ouvriers et même des comités de dames, à l’aide desquels la Ligue exerçait son influence sur les classes laborieuses et dans toute la société. Wilson était la tête de toute cette organisation, au sein de laquelle il savait entretenir l’activité, la concorde et l’émulation.

Voici encore, pour compléter cet aperçu sur l’intérieur de la Ligue, quelques détails que nous trouvons dans la publication d’un voyageur allemand : « … Je dus à la bienveillance d’un ami, dit M. Kohl, de pénétrer dans la vaste enceinte où se tiennent les séances du comité de la Ligue ; et j’eus l’occasion de voir et d’entendre des choses qui me surprirent au dernier point. Georges Wilson et d’autres chefs renommés de la Ligue, assemblés dans la salle du conseil, me reçurent avec autant de franchise que d’affabilité, répondant à toutes mes questions et me mettant au fait des détails de leurs opérations…. J’étais surpris de voir les ligueurs tous marchands, fabricants, littérateurs, conduire une grande entreprise politique, comme des ministres et des hommes d’État…. Pendant que j’étais dans la salle du conseil, un nombre prodigieux de lettres était apporté ; toutes étaient ouvertes, lues et répondues sans interruption ni retard.

«… Par l’intermédiaire d’associations locales formées sur tous les points de l’Angleterre, la Ligue a étendu son influence sur tout le pays…. Ses festivals, ses expositions, ses banquets, ses meetings apparaissent comme des solennités publiques.

«… Non seulement la Ligue répand ses opinions par l’organe des journaux, mais encore elle émet elle-même un grand nombre de publications…. Elle a surtout recours aux tracts, pamphlets courts et peu coûteux, qui sont l’arme favorite de la polémique anglaise…. La Ligue attaque ainsi perpétuellement le public et entretient comme une continuelle fusillade au petit plomb. Elle ne dédaigne pas des armes plus légères encore, des affiches et des placards contenant des pensées, des aphorismes, des sentences, des couplets contre le monopole et en faveur du libre échange. La Ligue et l’anti-Ligue ont porté leur champ de bataille jusque dans les abécédaires. »

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[1] Voir les détails de cette malheureuse époque dans le remarquable travail de M. Léon Faucher : Études sur l’Angleterre, 2 vol. in-8°, 1845, chez Guillaumin.

[2] Corn, céréales ; laws, lois. J’emprunte cet épisode à un travail que M. Alc. Fonteyraud a publié dans la Revue britannique, janvier 1846. M. Fonteyraud, mieux informé, a pu rectifier la version de l’auteur de l’ouvrage intitulé : Brief history of the rise and progress of the anti corn Law-League (London, petit in-8°), lequel fait courir des dangers à M. Birney et laisse croire que le meeting était hostile à la pensée du docteur.

[3] Circulaire contre l’impôt du pain.

[4] À l’immense majorité de 344 voix contre 197. Voir une note sur M. Ch. Villiers.

[5] Les Études sur l’Angleterre, de M. Léon Faucher, dans lesquelles se trouvent deux chapitres très remarquables sur la loi des céréales et sur la Ligue, n’ont paru qu’après l’ouvrage de M. Bastiat, intitulé Cobden et la Ligue ou l’agitation, etc. Celui-ci a été publié en juin 1845. Il contient, avec la traduction des principaux discours prononcés aux innombrables meetings tenus par la Ligue, une introduction sur la constitution économique de la Grande-Bretagne, sur les plans financiers de Robert Peel et sur les doctrines et les travaux de la Ligue. Cette introduction a d’abord paru dans le Journal des économistes, du 15 juin 1845. Deux autres publications dues à la plume originale de M. Alc. Fonteyraud, ont aussi contribué à faire apprécier la grandeur des événements qui se passaient en Angleterre. M. Fonteyraud avait pressé la main des ligueurs dans l’automne de 1845 et à son retour, il écrivit une première notice dans l’annuaire de l’économie politique, décembre 1845, et une seconde dans la Revue britannique de janvier 1846.

M. Bastiat accuse, dans son introduction, la presse française d’avoir organisé la conspiration du silence contre l’agitation de la Ligue. C’est une erreur. Si la presse n’a pas parlé plus tôt, c’est par ignorance plutôt que par mauvais vouloir. Très peu d’écrivains lisent les journaux anglais, et la plupart des feuilles publiques prennent des traductions toutes faites à un bureau spécial, qui ne donne de l’importance qu’aux nouvelles purement politiques ou aux anecdotes qu’il juge capables de piquer la curiosité. Or, ces traducteurs n’ont pas cru qu’une anti corn Law-League peut avoir rien de bien intéressant pour leurs clients. Sans doute, quelques hommes de science se préoccupaient des efforts de la Ligue ; mais ils n’étaient pas dans les journaux.

[6] Unconditional, sans la subordonner à des décisions analogues prises par les autres nations.

[7] Tout membre qui contribuait pour 50 livres ou 1250 francs, siégeait au conseil général, qui comptait plus de 300 membres.

[8] Il se prépare un grand tableau du conseil de la Ligue, qui sera reproduit par la gravure. La personne qui fait cette entreprise, et qui s’est adressée aux meilleurs artistes de la Grande-Bretagne, y a déjà dépensé 2 500 livres sterling.