Aux électeurs de l’arrondissement de Lodève. Élections législatives du 21 août 1881.

Paul Leroy-Beaulieu. Aux électeurs de l’arrondissement de Lodève. Élections législatives du 21 août 1881.


AUX ÉLECTEURS DE L’ARRONDISSEMENT DE LODÈVE

Mes chers concitoyens,

Vous êtes convoqués pour le 21 août à l’effet de nommer un député à la Chambre nouvelle.

Ce jour-là la France aura à choisir entre la République modérée et la République radicale.

Je suis pour la République modérée.

Les partisans de la République radicale veulent supprimer ou bouleverser presque toutes les institutions qui chez toutes les nations forment l’organisme gouvernemental.

Leur programme ne se compose guère que de destructions : Suppression du Sénat, suppression du Budget des Cultes, suppression de la Présidence de la République, etc.

Ce n’est pas avec ce radicalisme et cette violence que l’on procurera au Pays la Liberté, l’Ordre, la Prospérité et, ce qui est le plus grand des biens, la condition essentielle de tous les progrès, la Sécurité.

Électeurs,

Si vous me faites l’honneur de m’envoyer à la Chambre nouvelle, je ne croirai pas que mon devoir consiste à tout désorganiser. Sans ébranler nos institutions essentielles, je chercherai avec soin toutes les réformes pratiques dont on peut faire profiter le Pays.

C’est notre système administratif, économique et financier qu’il importe surtout de perfectionner. J’ai passé ma vie à étudier ces questions ; j’y ai acquis de la compétence.

Améliorer l’assiette défectueuse des impôts, la rendre plus équitable, décharger le contribuable des taxes qui l’oppriment ; rendre notre régime administratif moins vexatoire ; élargir les libertés de tous ; faire que, dans tout le domaine de la vie civile, industrielle et commerciale, tous les citoyens soient vraiment des hommes libres, indépendants et responsables ; c’est à cette tâche que doivent se vouer les hommes sérieux et libéraux.

Partisan résolu de la Paix, je ferai mes efforts pour que le gouvernement par une politique digne et calme, évite les complications extérieures.

Électeurs de l’arrondissement de Lodève,

Vous n’avez pas seulement, dans l’élection du 21 août, à penser aux intérêts généraux de la France, vous avez aussi le droit et le devoir de considérer les intérêts particuliers de notre arrondissement.

Dans quel état d’abandon est l’arrondissement de Lodève ? Chacun de vous le sait. Où sont les chemins de fer, les canaux, les travaux publics que depuis si longtemps on vous promet ?

Comment se fait-il que notre arrondissement n’ait aucunement participé aux 500 millions que chaque année le gouvernement dépense en œuvres d’intérêt public ?

À un pays aussi délaissé que le nôtre il faut un député laborieux, assidu aux séances et préparé par ses études à prendre une part active aux travaux de la Chambre.

Voilà, mes chers concitoyens, les réflexions que je vous soumets.

La République doit mettre en pratique toutes les libertés ; elle doit étudier et appliquer toutes les réformes utiles en repoussant toutes les aventures ; elle doit enfin suivre une politique d’apaisement, de conciliation à l’intérieur et de paix au dehors.

Paul Leroy-Beaulieu

Membre de l’Institut,
Professeur au Collège de France,
Conseiller Général de l’Hérault

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