Un portrait de l’Institut Coppet : un libéralisme peut en cacher un autre

dh2Article de Politique Magazine n° 119, juin 2013.

Réhabiliter l’école française d’économie politique : tel est l’objectif de l’Institut Coppet.

Rarement un rejet n’a eu une portée si universelle, du moins en parole. C’est pourtant l’exploit qu’a réussi à accomplir le libéralisme, ce mot fourre-tout qui permet de disqualifier automatiquement son adversaire. On est toujours « ultra » libéral ! Difficile, donc, de défendre cette notion, surtout en France. C’est pourtant la mission que s’est confiée l’Institut Coppet, fondé en 2010 et présidé aujourd’hui par Damien Theillier, dans le but de mieux faire connaître le libéralisme dit « classique » dont Jean-Baptiste Say, Turgot, Frédéric Bastiat ou Benjamin Constant sont les représentants les plus illustres.

C’est au XIXe siècle qu’ils furent les plus influents, lorsqu’ils fondèrent la Société d’économie politique et une revue : le Journal des économistes. Historiquement, leur pensée puise son origine dans celle de l’école de Salamanque (Xve et XVIe siècle), théâtre du renouveau de la scolastique qui tenta de concilier la philosophie antique (Platon, Aristote) avec la théologie chrétienne, celle de Saint-Thomas d’Aquin en particulier. Si leur influence s’est amoindrie en France à partir de la Révolution française, elle a perduré jusqu’au début du Xxe siècle en Autriche où des économistes de renom, comme le prix Nobel Friedrich von Hayek, s’appuyèrent sur leurs travaux pour fonder l’école autrichienne d’économie. L’Amérique a aussi été une terre d’accueil favorable à ces idées.

Aux États-Unis, les libéraux « classiques » sont aujourd’hui appelés « libertariens », explique Damien Theillier : « Les libertariens s’enracinent dans le courant français. Le terme liberal a été confisqué par la gauche outre-Atlantique où il y est l’apanage des démocrates et des progressistes. » Or, il est indispensable de dissocier le sens originel du mot – où la propriété privée est le socle de l’ordre social et politique – de son sens moderne – la défense des libertés politiques ayant pour finalité la démocratie. Un ouvrage paru récemment revient sur cette distinction. Dépasser la démocratie (140 p., 9,50 euros, traduction française de l’Institut Coppet) est une déconstruction du système démocratique dans lequel « on donne aux uns le droit d’imposer leur préférence et leur volonté aux autres. ».  « L’asservissement à un tel pouvoir absolu est incompatible avec la liberté », résume Damien Theillier. Quelle forme de gouvernement conviendrait alors à un libéralisme entendu dans son sens originel ? « Pour le philosophe libertarien, Hans-Hermann Hoppe, la monarchie, du moins tant qu’elle n’est pas absolue, est un régime supérieur à la démocratie puisqu’elle laisse une plus grande liberté aux institutions naturelles, familles, églises, associations, poursuit le président de l’Institut Coppet. Par sa fonction, le roi a une vision à long terme contrairement aux politiciens professionnels qui n’ont que peu de souci de l’avenir. Seule compte leur prochaine réélection ! ».

Les premiers adversaires des libéraux classiques sont d’abord les Français eux-mêmes « qui n’aiment pas la liberté ». Très exigeante, requérant une éthique de la responsabilité, la liberté est l’ennemi de l’égalitarisme, si prégnant en France et sur lequel joue de longue date le socialisme pour contaminer les esprits, même les plus brillants.

La tâche de l’Institut Coppet est donc délicate mais elle a le mérite d’envisager une autre relation possible entre les individus et l’Etat. Une proposition d’actualité à l’heure où les gouvernants nous imposent, chaque jour, une mesure plus inepte que la précédente… mais toujours démocratiquement !

L’Institut Coppet organise un séminaire le 28 juin prochain : La démocratie, pourquoi ça ne marche pas ? Entrée libre mais inscription obligatoire : //depasserlademocratie.eventbrite.fr/

interview damien juin

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