Oeuvres de Turgot – 140 – Lettres à Condorcet

1774

140. — LETTRES À CONDORCET.

[Henry, 159 et s.].

XXX. (La goutte. — La morale. — Détails divers.)

Limoges, 14 janvier.

J’avais mandé, M., à Mlle de Lespinasse par le dernier courrier qu’il ne fallait plus m’écrire. Je suis obligé, à mon grand regret, de me rétracter. Une colique d’estomac assez vive, que j’ai eue avant-hier, et dont il me reste encore quelques ressentiments très légers m’a décidé à retarder mon départ, en partie parce que je veux avoir le temps de m’assurer entièrement contre le retour de cet accident, en partie parce qu’il m’a fait perdre quatre jours de travail sur lesquels j’avais compté, et qu’il faut remplacer. J’écrirai mardi et je manderai si l’on peut encore m’écrire le dimanche.

Je ne suis pas trop d’avis que les vertus soient opposées les unes aux autres, si ce n’est lorsqu’on entend par vertus certaines qualités actives, qui sont peut-être autant des talents que des vertus. Au surplus, tous ces mots ont été pris dans tant d’acceptions différentes et ont presque toujours été si mal définis qu’on peut aisément disputer des siècles sur ces matières sans s’accorder.

La morale roule encore plus sur les devoirs que sur ces vertus actives qui, tenant aux caractères et aux passions, sont en effet rarement réunies dans un haut degré, dans le même individu, mais tous les devoirs sont d’accord entre eux. Aucune vertu, dans quelque sens qu’on prenne ce mot, ne dispense de la justice, et je ne fais pas plus de cas des gens qui font de grandes choses aux dépens de la justice que des poètes qui s’imaginent produire de grandes beautés d’imagination sans justesse. Je sais bien que l’exactitude excessive amortit un peu le feu de la composition et celui de l’action, mais il y a un milieu à tout. Il ne s’est jamais agi, dans nos disputes, d’un capucin qui perd son temps à dompter les aiguillons de la chair (quoique, par parenthèse, dans la somme du temps perdu, le terme qui exprime le temps perdu pour les satisfaire, soit vraisemblablement beaucoup plus grand) ; il ne s’agit pas non plus d’un sot qui craint de s’élever contre les tyrans, de peur de faire un jugement téméraire.

À propos de jugement téméraire, on ne juge donc point l’affaire de Beaumarchais ? Messieurs craignent apparemment de juger témérairement[1].

Voltaire s’est mieux tiré que je l’aurais espéré de la proposition de travailler à l’éloge du maréchal de Richelieu dans la Galerie des hommes illustres.

Adieu, M., recevez les assurances de mon amitié. Est-il vrai qu’on ait découvert un complot pour assassiner le comte Du Muy ? Ce sont les Nouvelles de Marin qui parlent de ce fait[2].

XXXI. (Sophonisbe, de la Harpe. — Détails divers.)

Limoges, 21 janvier.

Je suis fâché et vraiment surpris, M., du mauvais succès de Sophonisbe[3]. La pièce est en général très bien écrite, et je n’y vois point ces familiarités qui ont fait rire le parterre et que M. de la Harpe doit, dites-vous, retrancher. Je n’y vois point non plus de longueurs sensibles, et le cinquième acte me paraît terrible et de la plus grande beauté. Je l’avais même vu représenter à Limoges par des acteurs très médiocres, à l’exception de celui qui jouait Massinissa, et le cinquième acte faisait sur moi un grand effet. Il faut, ou que je ne me connaisse point du tout en effet théâtral, ce qui est très possible, ou que la cabale des Clément et consorts dominât dans le parterre.

J’espère que cette fois, c’est tout de bon que je vous demande de ne plus m’écrire. Ce n’est pas que je n’aie encore un peu souffert de ma colique d’estomac ; mais je me ménagerai tant que je me flatte de pouvoir partir la semaine prochaine.

Adieu, M., chargez-vous, je vous prie, d’être mon interprète auprès de Mlle de Lespinasse et de tous nos amis.

XXXII. (Détails divers. — Iphigénie, de Glück.)

Paris, 26 avril.

Je suis tout honteux, M., que vous m’ayez prévenu. Mais chaque jour, je suis de plus en plus gagné par le temps.

Je ne sais comment vous faites pour faire tant de choses et être encore autant à vos amis et à la société. Je souhaite que votre santé n’en souffre pas et vous exhorte à profiter de votre séjour à la campagne pour ménager surtout vos yeux.

Vous avez vu le cheval Pégase[4] ? N’en êtes-vous pas enchanté ? Pour moi, j’ai vu enfin cet opéra de Glück[5]. Il y a des morceaux qui m’ont fait le plus grand plaisir ; tels sont le chœur de l’arrivée d’Iphigénie, les adieux d’Achille et d’Iphigénie des deux parts, les morceaux que chante Clytemnestre à la fin du troisième acte et le quatuor de la fin. Ces morceaux m’ont paru de la plus grande beauté. Il y en a d’autres qui m’ont fait plaisir ; mais je n’y ai pas trouvé, en général, assez de morceaux de chant ; et tant de récitatifs parlés ou obligés, ou d’airs qui se rapprochent beaucoup du récitatif, m’ont laissé désirer quelque chose. C’est peut-être la faute du poète, qui n’a point donné au musicien des paroles bien coupées, liées à l’action et propres au chant. Peut-être aussi le musicien a-t-il sur cela un faux système. Je trouve, comme l’abbé Arnaud, que les chœurs gagnent plus à être en action qu’ils ne perdent à être moins compliqués que ceux de Rameau. L’ouverture m’a plu comme chant, mais je n’y ai rien vu de tout ce que l’enthousiasme de l’abbé Arnaud lui a fait voir. J’ai été très flatté, dans mon ignorance, de voir que mon impression était assez conforme au jugement de l’ambassadeur de Naples[6]. Le pauvre ambassadeur nous quitte sans rémission à la fin de la semaine.

Il n’y a d’ailleurs aucune nouvelle ; les politiques prétendent que les co-brigands de la Pologne vont se diviser et que M. de Lascy fait sa cour à Mme et même à M. Du Barry, pour tâcher de nous entraîner dans cette querelle. Pour moi, j’espère beaucoup de notre sagesse et un peu de notre impuissance. Adieu, M., je voulais vous parler de vos affaires et de physique, mais je n’ai que le temps de vous embrasser avec la plus véritable amitié. Mlle de Lespinasse a souffert depuis votre départ ; mais elle est mieux. Mme d’Enville est arrivée, et vous fait mille compliments.

XXXIII. (Maladie de Louis XV. — Détails divers.)

Paris, 2 mai.

Quand vous seriez, M., dix fois plus actif que vous n’êtes, c’est-à-dire quarante fois plus que moi, je vous défierais de vous agiter autant que le font en ce moment tous les habitants de la fourmilière de Versailles. Vous savez ou vous apprendrez par tout le monde que le Roi a la petite vérole. Elle est confluente. Il est fort affaissé et si peu à lui qu’il n’a pas demandé les sacrements. Mme Du Barry l’a vu avant-hier et hier pendant le souper de Mesdames ; mais il ne lui a point parlé. L’archevêque[7] qui lui-même est très mal, a été, malgré les chirurgiens, à Versailles ; il a vu le Roi. Mais les douleurs de sa néphrétique l’ont pris ; il a pissé du sang, a rendu une pierre, et n’a point parlé au Roi de sacrements. On dit que le grand aumônier[8] s’en est chargé. L’archevêque est revenu à Paris. À minuit et demi, le Roi était très mal ; on prétend que les boutons s’aplatissaient ; on en augure très mal. Cependant, il n’avait point encore été question de sacrements. Mesdames qui n’ont point eu la petite vérole le voient toutes trois[9].

Vous aurez par moi ou par vos amis des nouvelles tous les jours. Mme d’Enville a été hier à Versailles ; mais elle n’a pu que remettre à M. de Beauvau le mémoire que nous avons fait pour une pension. M. de Maurepas en donnera une de son côté. Mais vous jugez bien que dans ce moment-ci tout est en l’air.

Le roi de Prusse a fait une chute, et on le dit dans un véritable danger.

Dieu veuille que les changements qui peuvent résulter des événements ne nous amènent pas la guerre.

J’écrirai demain à M. de Rodez[10]. Je vous embrasse. L’ambassadeur de Naples a, comme de raison, retardé son départ.

XXXIV. (Les ministres. — La gravitation ; les causes finales. — L’avènement de Louis XVI.)

Paris, 18 mai.

Je n’entends rien du tout à votre algèbre[11] et je soupçonne que les données du problème vous ont été mal présentées. Car certainement la proportion : GA/B  =  PA/C  dont vous semblez partir n’a jamais eu lieu et je ne vois même aucune apparence qui ait pu conduire à la supposer. Il est certain que les conditions réelles du problème sont totalement différentes de ce que vous avez cru qu’elles étaient. B est une quantité évanouissante et GA devient par là une quantité qu’on peut négliger et C. B, A. P. doit être aussi entièrement éliminé de l’équation, ce qui peut conduire à une solution plus élégante qu’on ne l’aurait espéré. Quant à A. T. il n’entrera point dans la nouvelle équation ; il ne peut être ni = CG, ni = CB, ni — C, mais je ne pense pas pour cela que l’équation en donne un meilleur résultat. J’ai peur qu’on ne puisse parvenir à se débarrasser de ce mélange de quantités positives et négatives qui compliquaient la première équation et dont il n’a jamais été possible de tirer aucun résultat avantageux. Il faut du temps pour calculer ce que produira le nouveau facteur[12] substitué à celui que le coefficient s. m. l. p. x. a fait disparaître.

Le problème dont vous vous occupez sur la possibilité d’une force de projection résultante de la gravitation universelle me paraît beaucoup plus intéressant. J’aime à vous voir méditer ce sujet, parce que je compte que vos réflexions vous conduiront à un résultat sur lequel nous ne sommes pas d’accord, mais qui me paraît indiqué par la physique, qui repose et satisfait l’esprit en métaphysique, et qui donne à la morale un appui solide et doux. Ce résultat n’est combattu que par une seule objection et cette objection me paraît prise ab ignoto. Voici ce que je pense du fond du problème : je ne crois pas impossible d’expliquer par la seule gravitation universelle telle force de projection déterminée, pour un mobile déterminé circulant autour d’un foyer déterminé, mais cette explication n’aboutira et ne peut aboutir à rien parce qu’elle-même suppose une situation déterminée de chacun des corps dont l’attraction du centre concourt au mouvement de projection qu’il s’agit d’expliquer. Je veux que telle comète puisse être placée dans l’espace, de façon que l’attraction du centre des forces d’un système se combinant avec celle des autres corps placés dans ce même système, cette comète, au lieu de tomber au centre décrive une parabole ou une hyperbole, qu’elle puisse voyager ainsi de système en système, jusqu’à ce qu’une autre combinaison des attractions qu’elle éprouvera en chemin avec son mouvement acquis, la fixe dans un système en changeant sa parabole en ellipse, que cette ellipse, par l’action combinée du soleil et des planètes du système et par la résistance insensible soit de la lumière, soit de la matière raréfiée de l’atmosphère solaire qu’elle rencontre dans son périhélie, devienne de moins en moins allongée et se rapproche peu à peu d’un orbite circulaire. Cette comète aura pu, après des millions de millions de siècles, devenir une planète : Mars, si vous voulez, ou la Terre. Mais tout cela ne lève aucune difficulté ; elle n’est que reculée et reste tout entière à résoudre. Car, pourquoi cette comète, au point où vous l’avez prise pour commencer à calculer son cours, était-elle dans tel point déterminé, avec telle ou telle vitesse, telle ou telle direction ; pourquoi tous les autres corps vers lesquels elle gravite et qui gravitent sur elle sont-ils dans tel moment, dans telle position respective, avec tel degré de vitesse dirigé suivant telle ligne ? Il est évident que c’est par la suite de tous les mouvements antérieurs, mouvements qui sont eux-mêmes le résultat de la combinaison de toutes les tendances de chaque corps vers tous et de tous vers chacun avec un mouvement de projection propre à chacun. Or, tous ces mouvements de projection ne peuvent être dans leur ensemble l’effet des tendance seules. La tendance n’agit que pour ramener au point d’équilibre le corps qui en est écarté. Une fois l’équilibre rompu, chaque corps arrivant par un mouvement accéléré s’en écarte de nouveau par un mouvement retardé jusqu’à un point d’où il recommence la même marche, ce qui explique très bien la conservation du mouvement, mais jamais sa production. L’univers tout entier n’est qu’un pendule compliqué ou, si vous voulez, un pendule qui représente tous les systèmes de l’univers et l’univers entier, comme la formule a2+2ab+b2 représente tous les carrés possibles. Jamais la pesanteur ne tirera seule le pendule de son point de repos. Jamais une tendance quelconque sans cause extérieure ne tirera les corps de leur point d’équilibre et jamais aucune tendance ne produira le mouvement si les corps à mouvoir ne sont actuellement placés hors de leur point d’équilibre. Il n’y a point de mouvement si une cause quelconque n’a placé tous les corps dans une situation hors de leurs points d’équilibre. L’impulsion des autres corps suppose le mouvement déjà produit. L’attraction ou toute autre tendance ne peut produire par elle-même qu’un repos éternel. Il faut donc que tous les corps soient placés hors de leur point d’équilibre par un ordre de causes agissant indépendamment des principes mécaniques connus. L’expérience nous montre une cause vraiment productive du mouvement et ne nous en montre qu’une : c’est la volonté arbitraire des êtres sensibles et intelligents. Je dis arbitraire, en ce sens qu’elle exerce un choix qui n’est point déterminé par des causes mécaniques extérieures et matérielles, Je ne veux point anticiper sur la grande question métaphysique de la liberté. Je ne veux point discuter les raisonnements par lesquels les philosophes irréligieux prétendent en démontrer l’impossibilité et qui ne me paraissent nullement démonstratifs. Je ne veux point rechercher comment le plaisir et la douleur, le désir et l’aversion, influent sur la détermination de la volonté. Je dis seulement que le seul principe productif de mouvement indiqué par l’expérience est la volonté des êtres intelligents qui n’est point déterminée primitivement, mais qui se détermine, non par des moteurs, mais par des motifs, non par des causes mécaniques, mais d’après des causes finales. Je dis que ces êtres sentant, pensant et voulant, se proposant des fins et choisissant des moyens, constituent un ordre de choses au moins aussi réel et aussi certain que celui des êtres supposés purement matériels agités par des causes purement mécaniques. Je dis que cet ordre de choses n’est pas plus incompréhensible que le système des êtres matériels et qu’il n’est pas moins constaté par l’expérience et par nos sensations, qu’il est même le seul dont l’existence nous soit immédiatement connue, puisque l’existence des corps n’est prouvée que par des inductions dont le résultat est certain, mais n’est pas démontré.

Voilà bien assez de métaphysique ; vous pourrez trouver qu’après avoir passé de la physique à la métaphysique, je passe de la métaphysique à la théologie, comme les corps qui passent de l’état solide à celui de liquide, et enfin à celui de fluide expansible ou de vapeur.

Je reviens sur la terre pour vous apprendre que Mme Du Barry a reçu une lettre de cachet pour se rendre à l’abbaye du Pontaux-Dames, près de Meaux, avec défense d’y parler à personne, même à sa famille, et assurance d’ailleurs qu’on aura soin de son sort et qu’on respectera la mémoire de son aïeul. Les avis sont partagés sur ce traitement ; mais tous les avis abandonneraient volontiers à la vindicte que demande l’honnêteté publique, les Du Barry et toute leur séquelle. On dit La Borde chassé. Le Roi verra les ministres le neuvième jour ; mais ils voient la reine. On dit que M. de Maurepas a été mandé à Choisy ; cela n’est pas encore sûr ; on raisonne à perte de vue, mais l’on ne peut rien prévoir, même avec vraisemblance. Le Roi a écrit au Parlement de continuer ses fonctions, sur quoi le Parlement a arrêté la grande députation et que le Roi sera invité à se montrer à ses peuples dans son lit de justice. Cette cérémonie insolite pour un roi majeur est provoquée vraisemblablement par le Chancelier pour consolider sa besogne et forcer les princes à se déclarer.

Je ne sais pas qui est le généalogiste de l’ordre de Saint-Lazare. Il n’y en a point sur l’almanach. Je m’en informerai.

Mme d’Enville vous fait mille compliments. Je vous embrasse.

XXXV. (Les ministres. — Détails divers.)

Paris, samedi.

Oh ! pour cette fois, le bon Condorcet est devenu un mouton enragé. Je ne saurais adopter vos craintes sur le compte de M. [13] et encore moins les préférences que vous donnez sur lui aux D. B.[14]. Il est impossible que des gens comme Mme d’Enville, l’abbé de V.[15] et beaucoup d’autres qui le connaissent depuis longtemps et qui le regardent comme honnête, se soient trompés au point où vous le supposez. Et quant aux préjugés qu’il a, il me semble qu’on pourrait être tolérant avec lui. D’ailleurs le ministère, pour lequel on le nomme, est précisément celui où ses préjugés sont le moins dangereux.

On ne sait point encore ce que la conférence de M. de Maurepas avec le Roi aura produit. On dit qu’il y en aura une seconde demain. En attendant, le Roi a confirmé les anciens ministres et leur a écrit à tous, dit-on, des lettres dont ils sont fort contents.

Je vous prie de me marquer ce que l’on paye dans votre pays pour l’apprentissage du métier de vannier. Je suis jusqu’à présent très peu content du travail du sieur Picard, votre protégé, qui jusqu’à présent a coûté beaucoup et n’a fait ni ouvrages, ni élèves. Mon projet actuel est de le laisser travailler pour son compte et de lui payer tant par élève qu’il formera. Il demande 120 francs pour les instruire pendant deux ans, terme au bout duquel ils doivent savoir parfaitement le métier. Il dit que c’est le prix d’usage en Picardie pour cet apprentissage. Mais comme je n’ai pas une grande confiance dans sa sincérité picarde, je vous serai obligé de me mander ce qui en est.

Adieu, M., recevez les assurances de mon attachement.

XXXVI. (Les ministres. — Détails divers.)

Paris, 24 mai.

Je ne saurais me rendre, M., à votre solution sur la jauge du tonneau[16] parabolique dont vous me parlez. Et malgré les inconvénients que vous trouvez avec raison dans sa forme, je la trouve encore préférable à toutes les autres qu’on peut proposer. Il ne s’agit pas ici d’un maximum absolu, mais d’un maximum relatif et dans lequel il faut avoir égard aux gênes du local et au peu de choix entre les matériaux qu’on a sous la main.

Pour votre autre problème sur l’action de la gravitation universelle, il me semble que mes conclusions métaphysiques se lient assez bien avec les réflexions physiques et je ne puis convenir de la qualification de mythologiques que vous leur donnez.

Il n’y a rien de nouveau et beaucoup de gens croient que le ministère restera tel qu’il est. Je ne sais point de nouvelles aujourd’hui de la santé de nos trois dames[17] ; mais je sais bien que Mme d’Enville vous en donne régulièrement des nouvelles. Mme de Beauvilliers, dame d’honneur de Madame Adélaïde, a aussi gagné la petite vérole.

Ces coquins de médecins avaient fait donner aux Sutton un ordre de sortir du Royaume comme exerçant la médecine sans qualité. Le Roi, sur les représentations qu’on lui a faites, a fait révoquer l’ordre.

Adieu, M., vous connaissez mon inviolable attachement.

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[1] Le jugement, condamnant les Mémoires de Beaumarchais, fut rendu le 26 février.

[2] On lit dans les Lettres de Mlle de Lespinasse à Condorcet en 1774 :

Dimanche. 8 mai. — Je sais que Mme la duchesse d’Enville et M. Turgot vous écrivent tous les jours ; ainsi, je ne vous dirai aucune nouvelle.

Juin. — Si vous voyez M. Turgot, dites-lui que notre plaisir n’est pas refroidi, mais que nous en renfermons l’expression dans nos cœurs, non pas royaux, mais dans nos cœurs sensibles et bien remplis de lui et de tout ce qui peut intéresser son bonheur.

Samedi, 25 juin. — Votre absence de Paris a dû faire un grand vide à M. Turgot ; il est bien peu informé depuis votre départ.

[3] La pièce avait été imprimée en 1770. Elle fut jouée au Théâtre français le 15 janvier 1774.

[4] Dialogue de Pégase et du Vieillard, par Voltaire.

[5] Iphigénie en Aulide, représentée le 19 avril.

[6] Caraccioli.

[7] Christophe de Beaumont du Repaire.

[8] Charles-Antoine de La Roche-Aymon, archevêque de Narbonne.

[9] Louis XV mourut le 11 mai.

[10] Champion de Cicé.

[11] Condorcet avait écrit le 10 mai :

« Le G. A. sera donc un menteur et un fripon dans toutes les actions de sa vie… J’espère que ces jours-ci M. B. fera traiter ce G. A. comme M. C. fit traiter le P. A. dans une semblable occasion. »

  1. A. cachait le grand aumônier ; C. B., A. P. ou M. B., l’archevêque de Paris Christophe de Beaumont qui avait été malade chez le Roi ; A. T. l’abbé Terray ; G. C. ou C. G., le grand chancelier.

[12] Louis XVI.

[13] Comte du Muy, nommé ministre de la guerre.

[14] Du Barry.

[15] Veri.

[16] Condorcet avait écrit fin mai : « Quoi ! vous êtes la dupe de frère Félix (le frère Felix, comte du Muy). Vous consentez à boire de ce tonneau jusqu’à la lie ! … Si le tonneau est ministre, nous serons brûlés avec des fagots verts… »

[17] Mlle de Lespinasse, Mme d’Enville et Mme Blondel.

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