Paul Leroy-Beaulieu et la marche vers l’égalité

Paul_Leroy-Beaulieu

« Les riches deviennent toujours plus riches ; les pauvres, toujours plus pauvres » : voici la phrase terrible que les socialistes jetèrent constamment devant les économistes, et que ceux-ci tardèrent tant à réfuter. En 1881, devant l’expansion du marxisme et la popularité de la thèse de la « paupérisation », le camp des économistes reçut enfin la contribution de Paul Leroy-Beaulieu, qui écrivit un ouvrage dont le titre dit tout : Essai sur la répartition des richesses, et sur la tendance à une moindre inégalité des conditions. Voyons ses arguments.


Paul Leroy-Beaulieu et la marche vers l’égalité

par Benoît Malbranque

(Laissons Faire, n°4, septembre 2013)

 

Soutenir que la seule politique économique juste et efficace consiste, en peu de mots, à laisser faire, et rappeler les œuvres des économistes français pour justifier cette assertion, ne suffit en aucun cas pour écarter les objections habituellement soulevées contre elle. Il faut donc étudier ces objections principales, une à une, à la lumière de la science économique, et indiquer à nouveau en quoi elles sont aussi injustifiées que contraires aux faits.

Si cette « contre-attaque » est utile pour l’éclaircissement de nos conceptions économiques, et j’ose croire qu’elle l’est, alors c’est la mission de notre revue que de l’engager. De tous les sujets sur lesquels elle pourrait porter, celui de l’inégalité des conditions est très certainement le plus décisif. Ce sera l’objet du présent article.

L’inquiétante progression de la misère humaine, dans nos propres nations occidentales, interpelle nécessairement les citoyens contemporains et leur fait aisément croire à la possible véracité de la thèse de la paupérisation — en somme, que les pauvres s’appauvrissent toujours. C’est pour retirer de leurs esprits cette croyance infondée que j’entends, avec l’aide de l’écrit de Paul Leroy-Beaulieu, défendre contre elle l’idée d’une amélioration continue des conditions des plus pauvres dans une société capitaliste.

Le nom de Paul Leroy-Beaulieu (1843-1916) apportera assurément infiniment plus de crédit à cette thèse que le mien propre. À une époque secouée par les passions nationalistes et insouciante face aux progrès de l’étatisme et du socialisme, Paul Leroy-Beaulieu resta pour les économistes l’une des personnalités les plus savantes et les plus respectées. Professeur d’économie politique au Collège de France, et membre de l’Académie des sciences morales et politiques, il faisait autorité dans le domaine de l’économie politique. Son écrit sur l’évolution des conditions des plus pauvres dans un système capitaliste mérite donc toute notre attention.

Bien qu’il avait abordé cette question brûlante à de nombreuses reprises de son intense carrière littéraire [1], Leroy-Beaulieu attendit longtemps avant de publier sa réfutation complète et en règle de l’idée de la paupérisation. Il faut dire qu’il rumina son ouvrage pendant plusieurs années, afin de le perfectionner et de le rendre inattaquable. Long de près de 600 pages, toutes noircies de paragraphes très serrés, son Essai sur la répartition des richesses avait en effet de quoi impressionner.

Avant de rentrer dans l’argumentaire du livre, il est sans doute nécessaire de fournir quelques mots d’explication sur son titre, et, par ricochet, sur son thème précis. Il était d’usage, à l’époque où écrivait Leroy-Beaulieu, de diviser la science de l’économie politique en quatre grandes rubriques : la production, la circulation, la consommation, et la distribution des richesses. De ces différentes sous-parties de l’économie, considérait Leroy-Beaulieu, aucune n’avait été aussi peu avancée du point de vue des principes fondamentaux, et aussi minée par les conceptions fausses, que celle concernant les lois sur la distribution des richesses. Quelles sont les lois qui président la répartition des revenus entre salaires, profits, et intérêts ? Y’a-t-il une part qui s’accroît aux dépens des autres à mesure que progresse la civilisation capitaliste ? Toutes ces questions, considérait Leroy-Beaulieu, avaient le besoin urgent d’être adressées scientifiquement, et pourtant, ils ne l’avaient pas encore été. Comme il l’expliquait dans sa préface :

« Au point de vue théorique, nous sommes arrivé à la conclusion que presque toutes les doctrines acceptées en économie politique sur la distribution des richesses sont à refaire ou du moins à rectifier. »

Dans cette partie de l’économie, les grands principes longtemps tenus pour évidents par les grands noms de la science économique, y compris les plus libéraux, étaient que le salaire de l’ouvrier ne pouvait jamais croître au-dessus du salaire de subsistance : Turgot l’avait supposé, Adam Smith l’avait posé en théorie, et David Ricardo en fit un axiome. Prenant le contre-pied de ces théories, Paul Leroy-Beaulieu indiquait au contraire :

« Nous avons voulu dans ce livre réviser en quelque sorte le chapitre de la science économique qui concerne la distribution des biens et des produits. L’étude attentive de la propriété, du capital, des profits industriels, des salaires, des relations des ouvriers et des patrons, nous a conduit à cette conviction que les peuples civilisés s’avancent vers un état de choses où les conditions seront de moins en moins inégales. »

« Le travailleur manuel, voilà le grand bénéficier de notre civilisation : toutes les si-tuations s’abaissent autour de lui, et la sienne s’élève. Si des voix ou intéressées ou ignorantes ne lui soufflaient pas la haine et l’envie, il verrait que le temps travaille pour lui et pour ses enfants, que toutes les lois économiques tournent en sa faveur et améliorent son sort soit absolu, soit relatif. »

« L’écart entre les fortunes et surtout entre les revenus est moindre qu’on ne le pense, et cet écart va en s’amoindrissant. Le paupérisme diminue au lieu d’augmenter. Nous sortons de ce que j’ai appelé « la période chaotique de la grande industrie », période de transformation, d’agitation, de souffrances, de tâtonnements. Sismondi, Villermé, Blanqui l’aîné ont été à bon droit effrayés de tous les maux que comportait cet âge de transition. Ces maux sont de nature temporaire : s’ils n’ont pas encore tous disparu, ils sont en train de disparaître. La société moderne reprend sa marche vers un état qui sera caractérisé par une beaucoup moins grande inégalité des conditions. »

Des quelques grands économistes de la période classique, ou de Paul Leroy-Beaulieu, qui a raison, qui a tort ? Bien entendu, il ne s’agit pas ici de trancher une question de personne, et d’attribuer des mérites à des penseurs morts il y a plusieurs siècles. Ce serait œuvre futile, et surtout très peu intéressante pour notre époque. Ce que nous désirons, nous citoyens du vingt-et-unième siècle, c’est obtenir des raisons, à partir du passé, de penser que la tendance naturelle du capitalisme est de réduire les inégalités, ou de les augmenter. L’ampleur du débat, et son importance pour les politiques économiques contemporaines, réclame le règlement d’une telle question.

La réponse de Leroy-Beaulieu était donc simple : la marche normale du capitalisme, pour autant qu’il ne soit pas freiné par des interventions malheureuses de l’Etat, est de réduire de plus en plus l’inégalité des conditions. Quels sont ses arguments ?

D’abord, du côté de ceux qu’on dit privilégiés, c’est-à-dire les rentiers, les chefs d’entreprise, et les détenteurs de capital, quelle est, rapidement, l’évolution probable de leur condition, comparativement à celle de la société dans son ensemble ? Leroy-Beaulieu soutient qu’ils sont ceux qui s’enrichiront le moins, en proportion, à mesure que la société s’enrichira. Comme l’analysait déjà Adam Smith, la concurrence existant entre les différents emplois des capitaux, forcera les capitalistes à se contenter de taux de profit de plus en plus réduits. L’ouverture des frontières, en outre, ajoutera encore un degré à cette concurrence. Une fois que les meilleurs emplois des capitaux sont trouvés, les capitaux restants ne trouvent plus que de moins bons emplois, et rapportent ainsi des profits décroissants.

Il faut clore ici cet examen, non qu’il soit inintéressant, mais il n’est pas la partie de la question que nous voulons examiner dans cet article. Prouver qu’il est faux de dire que « les riches deviennent toujours plus riches » nécessiterait un autre article. Pour l’instant, nous réservons celui-ci à cette autre question : les pauvres devien-nent-ils de plus en plus pauvres ?

Pour répondre à cette question, Leroy-Beaulieu avait recourt non à la théorie, car il n’est rien de moins sûr, rien de moins inaltérable, rien de moins convainquant qu’une théorie ; il avait recours à l’évidence de la réalité objective. Le point de vue qu’il adoptait est celui qu’il nous faudrait adopter nous aussi quand nous étudions ces questions : nous devrions chercher, dans les faits eux-mêmes, si les plus pauvres de nos concitoyens ont vu ou non leur situation s’améliorer. C’est ce que Leroy-Beaulieu fit à son époque, et il est à croire que les résultats qu’il présentait seraient les mêmes que ce que nous trouverions de nos jours, et ce pour une raison simple : il en va de la nature même du capitalisme.

Quelles sont les données objectives, les faits économiques précis, sur lesquels il est possible de porter son jugement, pour juger si oui ou non la condition de l’ouvrier s’est améliorée ? Il suffit, nous dit Leroy-Beaulieu, de chercher dans la vie de l’ouvrier ce qui, d’une manière positive, contribue à son bien-être. Il y a d’abord l’alimentation, car qu’y a-t-il de plus pressant que le besoin de se nourrir ? Viennent ensuite, par ordre de priorité presque biologique, le logement, l’habillement, et l’ameublement du domicile. Voyons donc, nous propose Leroy-Beaulieu, quelle fut, sous ces rapports, l’évolution des conditions des plus pauvres des Français, au cours des dernières décennies — donc de 1850 à 1880, une période pendant laquelle, selon les socialistes, l’ouvrier s’était appauvri à cause des excès du capitalisme.

Que dire de l’alimentation, d’abord, si ce n’est qu’elle s’est améliorée ? Les famines avaient été récurrentes au cours du dix-huitième siècle, et elles ne survivaient plus, au siècle suivant, que dans les manuels d’histoire. C’en était fini, non de la misère, non du dénuement, c’est certain, mais de l’extrême sous-nutrition qui était, cinquante ans auparavant, le lot d’une grande partie de la population, et qui avait, grâce au progrès du capitalisme, presque entièrement disparue.

Pour prouver entièrement ce fait, et en rendre la vérité inébranlable à une génération d’hommes qui devait pourtant en sentir d’elle-même l’évidence, Leroy-Beaulieu usait des statistiques. La consommation annuelle de froment, comme celle de la viande, a augmenté de 50% en cinquante ans ; la consommation de pomme de terre a triplé durant le même laps de temps ; celle du vin a doublé, celle de la bière aussi : au fond, il est tout à fait établi que l’ouvrier mange mieux, et davantage, que par le passé.

« Tous ces renseignements confirment ce qu’apprend l’expérience vulgaire, que l’alimentation de toutes les classes de la population est devenue depuis un demi-siècle, depuis vingt-cinq ans surtout, plus abondante et plus raffinée ; on pourrait presque dire que l’estomac de l’homme semble s’être élargi, tellement il absorbe aujourd’hui plus qu’autrefois. Faut-il parler du sucre et du café, raretés naguère, aujourd’hui d’un usage fréquent parmi la population ouvrière des villes, et même parmi celles des campagnes les jours de marché et de réunion ? »

« Le premier, le plus matériel besoin de l’homme, celui de l’alimentation, est donc pour toutes les couches d’habitants mieux satisfait aujourd’hui qu’autrefois. »

C’est donc une affaire entendue, et est-ce bien une surprise pour nous de l’apprendre : grâce au progrès du capitalisme, la nourriture de la population française, et surtout de la population ouvrière, s’est grandement améliorée, et est devenue plus raffinée. Nous pouvons donc, ayant réglé cette partie de la question, passer à l’appréciation des conditions du logement.

On le sait, les conditions de vie des plus pauvres étaient, au dix-neuvième siècle, assez médiocres quant à l’habitation, mais l’évolution était-elle vers l’amélioration, et, si oui, à quelle vitesse se faisait cette amélioration ?

Il est difficile, c’est certain, d’obtenir une règle correcte pour mesurer ces progrès. Le moyen le moins impropre, et pourtant loin d’être parfait, est d’étudier l’évolution du nombre d’ouvertures dans les maisons, car nous avons, et surtout nous avions déjà à l’époque, des statistiques précises sur ce fait. Par le passé avait été établi un impôt sur les portes et les fenêtres, qui touchait donc à proportion du nombre d’ouvertures qu’on avait dans sa maison. Les plus petites demeures ne possédaient qu’une ouverture : la porte ; les plus grandes, les plus spacieuses, et, disons-le, les plus luxueuses, comptaient quatre, cinq, voire six ouvertures. Considérer cette statistique permet donc de voir si le logement de la population française s’est amélioré ou non, et dans quelle proportion.

Les français de l’époque en auraient été convaincus, et les statistiques leur donnent raison : les maisons sont devenues, en quelques décennies, plus spacieuses et plus éclairées. Si l’on compare les années 1820 et 1875, comme le fait Leroy-Beaulieu, on observe que le nombre d’ouvertures dans les maisons de France a progressé de près de 80%. Si l’on entre dans les détails, on remarque que le nombre de maisons ayant une seule ouverture a diminué, comme a diminué celui des maisons à deux ouvertures. La compensation s’est faite par les maisons à trois, quatre, et surtout cinq ouvertures, qui sont de 20% plus nombreuses. Tout cela indique que les conditions de vie, du point de vue du logement, se sont aussi largement améliorées. Et Leroy-Beaulieu, ayant examiné ces éléments, de conclure :

 Certes, le taudis destiné à l’habitation de l’homme n’a pas encore disparu ; et le nombre des ouvertures des maisons n’est pas toujours un critérium exact du confortable de l’habitation. Dans les vastes cités ouvrières il y a encore bien des galetas misérables ; trop d’êtres humains logent dans des greniers ou dans des soupentes d’escalier ou bien s’entassent dans des chambrées nauséabondes. Mais laissons ces exceptions de l’extrême paupérisme ; voyons les choses de haut et dans l’ensemble. Le progrès de l’habitation humaine, même pour la classe la plus humble de la population, est incontestable depuis un demi-siècle. Il n’est pas de propriétaire obligé de reconstruire ses fermes ou ses logements de manœuvres des champs qui n’ait éprouvé combien étaient accrues les exigences de ces catégories de personnes pour leur habitation. On ne trouverait pas non plus aujourd’hui dans une ville ouvrière des quartiers entiers comme la rue des Étaques de Lille qui doit une triste célébrité aux descriptions de l’économiste Blanqui. Si la misère de beaucoup de logis d’ouvriers est souvent poignante, il ne faut pas oublier qu’elle était générale autrefois, qu’elle est exceptionnelle aujourd’hui.

Finissons cet aperçu déjà trop long par les quelques considérations que Leroy-Beaulieu réservait à l’habillement et à l’ameublement, pour achever de convaincre son lecteur que les conditions de vie s’étaient améliorées, et nettement améliorées, pour les plus pauvres.

Ici, les outils pour rendre compte de cette amélioration sont simples : il suffit de citer les prix du coton, du lin, et des autres toiles, pour comprendre qu’en quelques décennies, l’ouvrier français a pu, avec un même montant, s’offrir des vêtement d’une meilleure qualité, et dans une plus grande quantité. Un aperçu des prix des meubles nous fournit les mêmes conclusions. Encore un point où les progrès sont grands.

De toutes ces données sur l’évolution des conditions des français, et notamment des plus pauvres d’entre eux, Leroy-Beaulieu en conclut une « irrésistible évidence » : que les pauvres s’enrichissent chaque jour davantage :

Les faits que nous avons rapidement rassemblés démontrent avec une irrésistible évidence que toutes les classes de la nation ont participé au progrès général, que la classe ouvrière particulièrement en a profité sous la triple forme d’un accroissement de bien-être matériel, d’un accroissement de sécurité et d’un accroissement de loisirs. On examinera, dans le cours de cet ouvrage, s’il est vrai que les riches deviennent chaque jour plus riches ; mais dès ce moment on peut affirmer qu’il est faux que les pauvres deviennent chaque jour plus pauvres.

Pour les partisans des réformes sociales, ce n’est pas suffisant. Un prochain article de cette revue analysera le  « paradoxe de l’égalité » : la recherche constante d’une égalité absolue. C’est en la cherchant, et en ne réservant qu’à cette chimère son attention, qu’on pourrait ne pas admettre ces formidables progrès, au cours du XIXe siècle comme aujourd’hui :

Cependant, les améliorations partielles et graduelles que nous venons de décrire ne touchent pas le cœur de ceux qui se sont faits les apôtres des revendications populaires. C’est avec un superbe dédain que ces hommes parlent de ces progrès qu’ils qualifient de mesquins et d’insignifiants. Pour eux, le mot de pauvreté n’a pas de sens absolu ; il indique simplement une relation entre les moyens de jouir qu’a un individu et les moyens de jouir qu’ont d’autres membres de la société. La pauvreté, ce n’est plus le manque de ressources propres pour lutter contre la faim, contre le froid, contre la maladie ; la pauvreté, c’est l’état de tout homme qui ne peut se procurer toutes les jouissances qu’un autre de ses semblables se donne. Ainsi un ouvrier bien nourri, bien vêtu, bien logé, confortablement meublé, ayant en outre un dépôt important à la caisse d’épargne et des valeurs mobilières dans son portefeuille, allant le dimanche ou le lundi en tramway passer la journée à la campagne et revenant le soir assister du haut des galeries supérieures aux représentations d’un théâtre populaire, cet ouvrier se déclare pauvre parce qu’il n’a ni hôtel, ni domestiques, ni voiture, ni chevaux, ni loge dans les grands théâtres.

Malgré ce refus d’admettre la vérité, et de reconnaître que le capitalisme participe à l’amélioration des conditions des plus pauvres, et à l’affaiblissement des inégalités sociales, ils en restent à cette idée futile de l’égalité absolue. C’est donc pour eux, pour leurs représentants de l’époque de Leroy-Beaulieu et pour leurs bien trop nombreux successeurs contemporains, que nous devons répéter et prouver sans cesse que :

Les progrès du bien-être de la classe inférieure de la population sont et surtout seront, dans un prochain avenir, plus rapides que ceux de la classe moyenne et de la classe élevée. Sans arriver à un nivellement des conditions qui est impossible, à une uniformité des situations humaines qui serait mortelle à la société, le mouvement économique actuel conduit à un plus grand rapprochement des conditions sociales, à une moindre inégalité entre les fortunes.

C’est là un message décisif pour les amis du progrès.

Benoît Malbranque

 


[1] Voir notamment La Question ouvrière au XIXe siècle, Paris, 1872

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